Comme je vis à Compton, un coin de campagne fier de la qualité et de la quantité de produits agroalimentaires que ses agriculteurs et transformateurs mettent sur la table des Québécois, je vais vous parler « nourriture ». Question de rire un peu -et jaune parfois-, je vais jaser d'épicerie et des fluctuations d'humeur que les visites au magasin d'alimentation provoquent chez moi depuis toujours et encore aujourd'hui.
Mais d'abord, il faut comprendre que mon rapport délinquant avec la nourriture - du genre yo-yo - n'est pas d'aujourd'hui. Ça a commencé au secondaire, en onzième année quand, après 5 ans de boîte à lunch à l'école, j'étais tellement écœurée que j'ai fini, au grand désespoir de ma mère, à n'y manger que des sandwiches au pain blanc et à la moutarde jaune. Jour après jour, après jour, après jour... jusqu'à la cafétéria du cégep. Ce fut le début de ma longue quête pour le régime parfait!
À 19 ans, en amour avec un chum macrobiotique, je me suis tapée six mois sans aucun sucre. J'équilibrais mon Yin et mon Yang à grosses cuillerées de kacha, de miso et de chou quasiment cru. Jusqu'à ce qu'un bon matin, je célèbre ma rupture avec le grand maigre qui sentait le soya en gobant tout un sac de biscuits Oréo. Affublée d'un méchant mal de tête et le Yin complètement en compote, j'ai sauté dans un avion et me suis retrouvée en France au paradis des Pithiviers et des choux à la crème. Superbe belle place pour manger ses émotions et en revenir quelques mois plus tard la valise remplie de vêtements neufs, trois tailles plus grandes!
J'étais alors devenue une plantureuse bibitte à sucre végétarienne. Pour rien au monde je n'aurais bouffé du cadavre, mais n'avais pourtant aucun scrupule à engouffrer des tonnes de pouding au chômeur, pourvu que ce ne fût pas animal. Puis un jour, quête spirituelle aidant, j'ai réalisé que je devais absolument m'irriguer le colon si je voulais mieux transcender... Oh boy! Ma période extracteur à jus Champion venait de voir le jour. Des semaines de jeûne liquide au jus de raisin, de pamplemousse, de carottes et même de gazon me nettoyèrent tellement les boyaux... qu'il n'y avait plus rien dedans. « Je souffre de constipation », dis-je donc candidement au gourou médecin ayurvédique qui passait alors dans ma vie. « Qu'à cela ne tienne, répondit-il à la croyante que j'étais, il vous faut un régime froid, lacté et liquide. Je vous prescris de ne manger que de la crème glacée ». Ce que je fis avec dévotion - au chocolat, à la vanille et à la fraise - pendant des jours et des jours jusqu'à ce que la machine à boyau reparte de plus belle. Super régime, je vous le conseille.
Là, je sais que vous ne me croyez pas. On ne peut pas être assez fou pour faire des choses pareilles, vous dites-vous. Elle raconte certainement des blagues pour nous faire oublier les problèmes sur la planète. Ben non! Je vous l'assure, on peut être assez fou pour faire ça... Et même, en retirer du plaisir. Je n'ai pas fini d'ailleurs, ne manquez pas la prochaine chronique où je continuerai à vous raconter toutes les aventures culinaires qui font toujours et encore aujourd'hui de mes visites à l'épicerie des aventures fascinantes et périlleuses...