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Les avocasseries corporatistes…

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Daniel Nadeau Par Daniel Nadeau
Mercredi 10 décembre 2025

C'est le chroniqueur politique du Journal de Montréal, Antoine Robitaille, qui m'a mis la puce à l'oreille. Dans un texte publié le 15 novembre dernier, Antoine Robitaille conteste la sortie médiatique du Barreau du Québec contre des projets, dont celui sur la rémunération des médecins adoptée sous le bâillon, celle sur la constitution québécoise et celle visant à améliorer la transparence des syndicats. Robitaille rappelle aussi l'épisode malheureux de la contestation par ses membres de l'autorité du président du Collège des médecins, Mauril Gaudreault, parce qu'il avait osé rappeler aux médecins certains principes de déontologie dans le contexte des moyens de pression déployés par les fédérations médicales, les spécialistes et les omnipraticiens. À juste titre, le chroniqueur pose à la fin de sa chronique la question qui tue : « Ai-je tort de penser que l'État de droit implique aussi des ordres professionnels pouvant se concentrer sur l'essentiel ? » Moi je réponds que les ordres professionnels de ces puissantes professions libérales devraient faire preuve d'une plus grande retenue et éviter de donner dans l'activisme politique.

Démocratie, jeux de base...

La démocratie repose sur une multitude de piliers, parmi lesquels figurent la séparation des pouvoirs, la protection des droits et libertés ainsi que la défense de l'intérêt public. Récemment, la position du Barreau du Québec sur certains projets de loi du gouvernement Legault ne peut que susciter de l'étonnement pour l'observateur de l'actualité que je suis. Cela met en cause la nature même des ordres professionnels. En dénonçant trois projets de loi qu'ils considèrent comme portant atteinte aux droits et libertés de la population, et en parallèle avec la réaction des membres la Corporation des médecins face à des réformes de leur rémunération, ces actions soulèvent des questions fondamentales sur le rôle des ordres professionnels. Ces enjeux soulignent à gros traits les risques d'un corporatisme d'intérêt qui, sous couvert de défense de l'intérêt public, peut conduire à une dérive démocratique.

 

Ça mange quoi en hiver un ordre professionnel ?

Les ordres professionnels, comme le Barreau du Québec, ont été créés pour réguler et guider les pratiques de leurs membres, tout en veillant à la protection du public. Leur mission première est de s'assurer que les standards professionnels sont respectés et que les pratiques des membres sont conformes à l'éthique et aux attentes sociétales. Toutefois, la frontière entre le défenseur de l'intérêt public et le défenseur des intérêts privés peut devenir floue.

Le Barreau du Québec est chargé de veiller à la protection du public dans l'exercice de la profession légale. Cependant, lorsqu'il s'exprime sur des questions politiques par des communiqués de presse, il incarne une voix puissante qui peut influencer les débats politiques. L'activation de ce pouvoir en faveur de la profession ne peut qu'entraîner des accusations de corporatisme, une tendance qui pourrait potentiellement nuire aux valeurs démocratiques sur lesquelles il repose.

Quant à elle, la Corporation des médecins défend les intérêts de ses membres, en particulier lorsqu'elle s'oppose à des changements législatifs qui affectent la rémunération et les conditions de travail des médecins. Plus encore, le jupon dépasse lorsque le leadership de la Corporation est contesté parce que l'on émet des commentaires d'ordre éthique sur des moyens de pression déployés par les fédérations de médecins. Cela ne peut que soulever des doutes du point de vue de l'intérêt professionnel des membres et de l'intérêt public. Les privilèges des médecins ne doivent pas être confondus avec l'intérêt de la population. Cela ne peut que conduire à la conviction qu'il y a là un manque d'équilibre entre l'intérêt public et l'intérêt corporatiste.

Plus encore, la capacité des ordres professionnels à prendre position sur des questions politiques soulève des limites éthiques et sociales. Lorsque ces entités s'engagent dans l'activisme, il est essentiel d'examiner les motivations qui sous-tendent leurs actions et les implications pour la démocratie.

L'activisme politique des ordres professionnels...

Le Barreau du Québec, en dénonçant certains projets de loi, se positionne parfois comme le défenseur de la démocratie. Cependant, cette posture peut être perçue comme un activisme masqué visant à protéger des privilèges professionnels, au détriment de l'intérêt public qu'il prétend défendre. Cet activisme peut créer des conflits d'intérêts, quand les lignes d'action de la corporation se heurtent aux besoins plus larges de la société.

Les communiqués de presse et les déclarations publiques des ordres professionnels peuvent également manipuler l'opinion publique. En accentuant certains aspects des projets de loi tout en en minimisant d'autres, ces corporations peuvent créer une perception biaisée des enjeux réels. Ce phénomène peut s'apparenter à une stratégie de communication visant à façonner la discussion publique selon leurs intérêts professionnels.

Avez-vous des exemples de vos affirmations, monsieur le chroniqueur ?

Ben oui chose, j'en ai. Pour illustrer ces préoccupations, plusieurs exemples d'ordres professionnels s'éloignant de leur mission première au profit d'intérêts corporatistes démontrent cette tendance inquiétante. Pour s'en convaincre, il s'agit de prendre connaissance des tensions entre la FMSQ et ses pédiatres qui sont en guerre ouverte sur la question de la rémunération. Les pédiatres sont beaucoup moins payés que les autres spécialistes, 30 % de moins en moyenne. Serait-ce parce que les pédiatres sont des femmes en majorité ? Ce qui est vrai pour les pédiatres est aussi vrai pour d'autres types de spécialistes dont les cohortes sont majoritairement composées de femmes.

L'opposition du Barreau du Québec à certaines réformes judiciaires peut parfois sembler plus motivée par la préservation des intérêts de la profession que par la protection du système judiciaire dans son ensemble. Par exemple, des critiques contre des propositions visant à rendre la justice plus accessible peuvent être comprises comme une tentative de préserver des enjeux économiques pour les avocats, plus que comme un souci authentique pour le public.

Devant des réformes touchant la rémunération, les médecins, par le biais de leur corporation, peuvent mettre en avant des préoccupations légitimes concernant la qualité des soins. Toutefois, il arrive que ces préoccupations soient teintées d'un désir de défendre une position économique favorable à leurs membres, parfois au détriment de l'accès aux soins pour les citoyens. Par exemple, lorsque les médecins s'opposent à des mesures d'économie dans le secteur de la santé, la légitimité de leurs revendications peut être obscurcie par la nécessité de protéger des avantages financiers. Manifestement, la contestation du leadership du président Martial Gaudreault est un exemple criant de l'emprise des fédérations et de leurs intérêts sur le bien commun. Tout cela n'est pas sans conséquence pour la démocratie.

La dérive corporatiste...

La dérive vers un corporatisme d'intérêt peut entraîner plusieurs conséquences sur le fonctionnement démocratique. Lorsque les ordres professionnels semblent plus préoccupés par leurs intérêts que par ceux de la population, cela peut éroder la confiance publique dans ces institutions. Le cynisme à l'égard des institutions politiques et professionnelles peut s'accroître, entraînant une apathie civique. Cela remet en question la légitimité des corporations, et par la suite, celle des politiques qu'elles défendent.

Les conflits d'intérêts deviennent inévitables lorsque les ordres professionnels se polarisent autour de la défense de leurs membres, souvent en opposition aux politiques publiques. Cela peut conduire à un manque de transparence, où les décisions politiques sont influencées par des groupes d'intérêt au lieu de refléter les besoins de l'ensemble de la société.

Pour contrer cette dérive, certaines réformes pourraient être envisagées pour rétablir l'équilibre entre l'intérêt corporatif et l'intérêt public. Par exemple, une régulation accrue des activités des ordres professionnels pourrait permettre de mieux encadrer leurs prises de position et de garantir qu'elles n'empiètent pas sur le besoin de protéger l'intérêt public. Cela pourrait inclure des protocoles de transparence sur les motivations et les influences derrière les déclarations publiques. Il faut aussi faire appel au sens civique des membres des corporations et les encourager à s'engager dans des actions qui renforcent les valeurs démocratiques et le bien-être communautaire afin de réorienter les priorités des corporations. La sensibilisation aux enjeux publics, l'intégration de la diversité dans les prises de décision, et l'encouragement d'une représentation plus équilibrée des intérêts pourraient contribuer à cet objectif.

Avocasseries corporatistes...

L'engagement du Barreau du Québec et de la Corporation des médecins dans des questions politiques révèle des enjeux profonds autour des ordres professionnels et de leur rôle dans la société. Bien que la défense des droits et des libertés soit essentielle, cela ne doit pas masquer une tendance vers un corporatisme d'intérêt qui pourrait compromettre les fondements mêmes de la démocratie. En cherchant à équilibrer l'intérêt public avec les intérêts professionnels, il est crucial d'évaluer la manière dont ces corporations se positionnent et agissent. La démocratie nécessite une vigilance permanente pour éviter que l'intérêt corporatif prenne le pas sur le bien commun et ainsi assurer un engagement authentique envers l'intérêt général. La réforme, la régulation ainsi que la promotion active de l'engagement civique sont des voies potentielles pour garantir que les ordres professionnels servent vraiment le public et non leurs propres fins. Nous avons déjà une table pleine avec les dérives des médias sociaux, les dérives autocratiques des gouvernements élus et la polarisation des opinions pour que l'on puisse demander aux Ordres professionnels de ne pas s'adonner à des avocasseries corporatistes...


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