J'ai un malaise profond avec le
monde des médias et l'opinion publique ambiante eu égard à la crise au Parti
libéral du Québec. C'est connu, j'ai un attachement particulier à cette
formation politique qui est ma famille politique nonobstant le bref flirt, peu
concluant, que j'ai eu avec la Coalition avenir Québec au temps de mon deuil de
mon associé et ami Yves Bellavance. Je fus convaincu alors par un ami
d'Yves, 'ex-journaliste Mychel St-Louis, de me joindre à la Commission
politique de la CAQ. Ce fut de courte durée, je n'y avais pas ma place. Tout
cela pour dire que le malaise que je ressens, c'est avec le discours ambiant
envers ma famille politique, le Parti libéral du Québec, que l'on juge corrompu
et étranger à l'histoire du Québec. Rien n'est plus faux si l'on a un certain
respect pour la vérité et les faits.
Situons bien l'enjeu : le
PLQ est plongé dans une crise du leadership de son nouveau chef, Pablo
Rodriguez, élu en juin dernier il y a à peine cinq mois. La source de cette
crise est un magma de faits incompréhensibles mettant en cause la cheffe de
cabinet choisie par Pablo Rodriguez, Geneviève Hinse, et sa cheffe
parlementaire, Marwah Risqy. La crise de leadership au PLQ révèle des fractures
entre des cultures politiques étrangères l'une à l'autre : celle d'Ottawa
et celle de Québec. Dans ce contexte, la révélation de l'existence de textos
douteux, des allégations dont on ne connaît pas le bienfondé, laissant croire à
des malversations de la part de la campagne de Pablo Rodriguez est étrange. L'implication
de l'UPAC soulève plus de questions qu'elle n'offre de réponses. Il semble que
cet organisme policier n'a pas retenu les leçons de ses interventions
intempestives dans le dossier de l'ancien premier ministre libéral, Jean
Charest. Il est improbable, à moins d'une démonstration du contraire, que
quiconque ait pu acheter la course au leadership du PLQ. C'est invraisemblable.
D'ailleurs, seuls des
francophones traduisent brownies par des bruns. Pour les anglophones, ce terme
réfère plutôt à une récompense ultérieure, des considérations futures. D'autre
part, le comportement de Marwah Rizqy dans ce dossier constitue un mystère
impénétrable qui s'explique peut-être par un banal conflit de personnalités
entre deux personnes. À ce titre, les causes du congédiement de Geneviève Hinse
sont sans doute le secret le mieux gardé en ville. Nous sommes dans le flou.
Des faits à se rappeler...
Pour celles et ceux que la vérité et
les faits intéressent, sachez que dans l'histoire du Québec, une seule
formation politique a été prise la main dans le sac en matière de financement
de ses activités et c'est le Parti Québécois, n'en déplaise à l'ex-députée
péquiste et aujourd'hui commentatrice, Elsie Lefebvre. Quant à elle, la Coalition
avenir Québec a suspendu ses activités de financement pour des activités
irrégulières. Le bellâtre Paul St-Pierre Plamondon aurait intérêt à lire le
rapport Moisan pour constater que son parti n'est pas exempt de tous reproches
en matière de financement illégal. Il pourrait ainsi faire preuve de plus de
mesure avant d'accuser le PLQ d'être un parti politique culturellement corrompu
à cause de sa défense de l'État colonial. Pincez-moi, je rêve.
D'autre part, la présence de l'UPAC
dans ce dossier ne me rassure pas si je me rappelle l'épisode des fuites
orchestrées contre le PLQ et qui ont fait un tort irréparable à son ancien
chef, Jean Charest. Puis je rappelle que cela n'a jamais donné lieu à des
poursuites. Mieux encore, les poursuites ont été abandonnées et l'UPAC a refusé
de s'excuser malgré les torts causés à monsieur Charest et à sa famille. Ce qui
a obligé l'État québécois à verser une compensation financière à monsieur
Charest. Ces faits n'ont pas empêché la députée de Verdun de Québec solidaire, Madame
Alejandra Zaga Mendez, de brandir un ancien bouquin paru sur la question comme
si cela était une vérité. C'est un geste indigne dans notre société de droits
et des attaques injustifiées envers le Parti libéral du Québec et ses membres.
Les membres du Parti libéral du Québec méritent mieux que cette vindicte
populaire trumpiste qui fait honte à celles et à ceux qui comme moi croient que
nous vivons dans un État de droit où la présomption d'innocence est le
fondement de notre système de justice. Une vérité que semble ignorer l'actuel
ministre de la Justice, Simon Jolin-Barette, qui a déjà présumé de la
culpabilité du PLQ. Coupable de quoi au juste ? On ne sait pas de quoi il
parle.
Le PLQ, un grand parti politique
québécois
Sans vouloir faire toute l'histoire,
il semble approprié de rappeler à toutes et tous que le Parti libéral du Québec
(PLQ), fondé en 1867, est l'un des plus anciens partis politiques du Canada.
Issu du mouvement réformiste du Bas-Canada, il prend forme autour d'idées
progressistes, de la défense des droits individuels et du développement économique.
Pendant ses premières décennies, le PLQ alterne au pouvoir avec les
conservateurs, mais c'est au début du XXᵉ siècle qu'il s'impose véritablement.
Sous Lomer Gouin (1905-1920) puis Louis-Alexandre Taschereau (1920-1936), le
PLQ domine la scène politique québécoise, encourageant la modernisation
économique du Québec, notamment par l'industrialisation et les investissements
dans les infrastructures. Toutefois, la Grande Dépression affaiblit le parti,
ouvrant la voie à l'Union nationale de Maurice Duplessis. Le PLQ revient au
pouvoir en 1960 avec Jean Lesage, figure centrale de la Révolution tranquille.
Sous le slogan « Maîtres chez nous », le parti amorce une transformation
majeure : nationalisation de l'hydroélectricité, réforme de l'éducation, affirmation
de l'État québécois et laïcisation des institutions publiques. Cette période
pose les bases du Québec moderne.
Après une alternance avec l'Union
nationale à la fin des années 1960, le PLQ est mené par Robert Bourassa qui
gouverne de 1970 à 1976, puis de 1985 à 1994. Son leadership est marqué par de
grands projets économiques, la création de la Baie-James et des débats
constitutionnels (rapatriement de 1982, accord du lac Meech et accord de
Charlottetown). Daniel Johnson a conduit les troupes libérales durant la
campagne référendaire de 1995 et a cédé sa place à Jean Charest par la suite.
Dans les années 2000, sous Jean Charest, le PLQ continue de promouvoir une
vision fédéraliste, des réformes économiques et l'ouverture des marchés. Son
gouvernement fait face à des contestations importantes, notamment pendant la
crise étudiante de 2012. Enfin, il y a eu aussi l'époque de Phillipe Couillard
qui a été marquée par une gestion rigoureuse des finances publiques qui a
permis au gouvernement de François Legault de disposer de surplus budgétaires à
son arrivée au pouvoir.
Aujourd'hui, le PLQ demeure un acteur
politique majeur, représentant principalement le fédéralisme canadien, un
libéralisme économique modéré et des valeurs progressistes en matière sociale,
tout en cherchant à consolider son identité dans un paysage politique québécois
en profonde mutation. Nous sommes loin d'un parti politique corrompu et
colonialiste.
Alors qu'en est-il aujourd'hui ?
La dichotomie entre la politique
fédérale et la politique provinciale ne date pas d'hier. Le PLQ,
traditionnellement perçu comme un parti fédéraliste, tente de naviguer entre
les attentes de ses électeurs au Québec et celles de ses instances fédérales à
Ottawa. Les tensions entre ces deux réalités ont toujours été présentes, mais
elles se sont exacerbées ces dernières années, en partie à cause des mouvements
indépendantistes et des enjeux sociétaux (comme l'immigration et les droits des
minorités) qui résonnent différemment dans les deux contextes.
Le PLQ est composé de différentes
factions, qui vont des centristes aux sociaux-démocrates. Chaque faction
possède ses propres priorités et ses propres stratégies, ce qui rend parfois
difficile la cohésion au sein du parti. Cette géographie politique interne est
d'ailleurs différente quand le PLQ est au pouvoir et quand il est dans
l'opposition. S'il est vrai que le PLQ est distinct du Parti libéral du Canada.
Il n'est pas moins vrai que ses militants sont parfois aussi des militants du
Parti libéral fédéral dans l'Ouest-de-l'Île.
Les récentes allégations de
malversations à l'encontre de la campagne de Pablo Rodriguez ont créé une onde
de choc au sein du PLQ. Ces révélations entachées de suspicion et de
controverse ne font qu'ajouter à la perception de désordre au sein du parti.
Pablo Rodriguez, en tant que leader, doit maintenant faire face à des
accusations qui peuvent ternir son image et celle du PLQ tout entier.
Analyser le choix du moment de ces
révélations est essentiel. À l'approche des élections, les autres partis
politiques ont tout intérêt à affaiblir la position de Rodriguez. Cette
situation soulève la question de la manipulation politique, des jeux de pouvoir
et de l'enflure médiatique qui se cachent derrière ces accusations. En
politique, chaque allégation peut entraîner des répercussions graves sur la
confiance des électeurs et sur la dynamique de la campagne.
La cheffe parlementaire, Marwah Rizqy
joue un rôle central dans cette crise de leadership. Le congédiement inattendu
de Geneviève Hinse symbolise peut-être l'éclatement de tensions accumulées
entre ces deux femmes. Un tel événement envoie un message de fragilité au sein
du parti et soulève des interrogations sur la gestion des ressources humaines,
sur les rapports de force et sur le leadership de Pablo Rodriguez et de
l'esprit d'équipe de certains.
En dépit des difficultés rencontrées,
Pablo Rodriguez doit reconnaître qu'il a commis une grave erreur dans ce
dossier. Il n'aurait pas dû prendre fait et cause pour sa cheffe de cabinet
contre une élue respectée. Il devait calmer le jeu auprès de toutes les parties
impliquées, ce qu'il n'a manifestement pas réussi à faire. Aujourd'hui, il n'a
d'autres choix que celui de réussir. La nécessité de rassembler son équipe,
celle de répondre aux critiques, la manière dont il gère les tensions internes
ainsi que sa stratégie de communication envers le public seront déterminantes
pour l'avenir de son leadership. À cet égard, l'avis des membres du PLQ, ainsi
que celui de l'électorat, sera crucial pour juger de la viabilité de sa
position. On ne peut pas prétendre que sa gestion de crise a été exemplaire
jusqu'à maintenant même s'il semble difficile de faire mieux étant donné les
circonstances. Son leadership et les chances de victoire du PLQ à la prochaine élection
sont intimement liés, quoiqu'en pensent les pseudos putschistes en verve du PLQ
qui s'agitent dans les coulisses.
L'avenir...
Les choix stratégiques du PLQ auront
un impact direct sur le comportement électoral. Si Rodriguez parvient à
reconquérir la confiance de ses membres et du public, le PLQ pourrait se
présenter aux élections avec un certain soutien. Cependant, si les fractures
internes restent béantes et si les allégations d'irrégularités non prouvées
persistent, cela pourrait conduire à une perte de confiance significative,
ouvrant la voie à des adversaires politiques.
Dans ce climat tendu, l'opposition,
notamment le Parti québécois et la Coalition Avenir Québec et le Parti
conservateur, pourrait tirer profit de la faiblesse perçue du PLQ. Ces partis
auront l'occasion de tirer profit des tensions internes et les controverses
entourant Rodriguez, en proposant des alternatives claires et en consolidant
leur base électorale.
La crise de leadership qui frappe le
PLQ met en lumière des fractures profondes au sein des cultures politiques
d'Ottawa et de Québec, ainsi que des tensions internes qui menacent de
fragiliser le parti. La gestion de cette crise par Pablo Rodriguez sera
déterminante pour l'avenir de son leadership et pour le positionnement du PLQ
en vue des prochaines élections.
Les récentes révélations, les conflits personnels et les rivalités
internes démontrent que dans le domaine politique, les enjeux vont bien au-delà
des simples allégations. Ils touchent à la cohésion et à l'identité même du
parti. Alors que l'échéance électorale approche, la capacité du PLQ à surmonter
ces défis sera cruciale pour sa survie et son succès futur sur la scène
politique québécoise. L'avenir du PLQ dépend d'un leadership fort de Pablo
Rodriguez, d'une communication efficace et d'une capacité pour le PLQ de faire
face de façon unie à cette adversité moussée par le cycle médiatique.
Néanmoins, cette crise a déjà fait une grande victime, soit celle de notre État
de droit et de la présomption d'innocence. Pour bien des gens, c'est injuste,
mais c'est la réalité, Pablo Rodriguez et le Parti libéral du Québec sont
présumés coupables. C'est dommage pour notre vie démocratique mais il faut
garder confiance au jugement des électeurs.