On baigne dans un climat guerrier.
Bien sûr, il y a la Russie et l'Ukraine. Le narcissisme
autoritaire de Poutine qui dégouline dans le sirop de ses paroles. Sirop sucré
à outrance pour faire oublier l'amertume et les saloperies qui se cachent
derrière les mots du président fêlé.
Bien sûr, il y a Israël et la Palestine. Les monologues
infectés du président israélien Benjamin Nétanyahou qui cherchent à faire
croire qu'il est le sauveur d'une Palestine qu'il souhaite libérer de l'emprise
du Hamas. Il faut avoir l'esprit tordu et la soif de pouvoir hyper développée
pour venir jouer les pacifistes tout en tuant allègrement des milliers de
personnes.
Et il y a l'autre, aux États-Unis, qui se targue d'avoir
arrêté 6 guerres depuis qu'il est président (guerres qu'il n'est pas capable de
nommer, mais ce n'est pas grave parce qu'il sait que sa base ne retiendra que
le chiffre, de toute façon !). L'autre, qui souhaite une chose : recevoir le
Nobel de la paix...
Trois paragraphes et
voilà que l'indigestion me guette.
La guerre ! La grande. La vraie. La nouvelle vraie, je
devrais dire. Celle qui tue à distance, de nos jours. Celle où les drones et
les bombes à tête chercheuse ont remplacé les soldats du front. La guerre qui
ramène les morts à une statistique qui s'accumule en haut de l'écran du jeu vidéo
qu'elle est devenue. La guerre dans laquelle les morts sont un score. Un simple
score et non des humains qu'on assassine.
Une guerre qu'on
regarde, subjugués par le non-sens des atrocités.
En plus, on vit dans un quotidien qui cultive les petites
guerres. Celles de l'intransigeance, du refus d'accepter les différences entre
les personnes. Celles qui créent des bonnes et des mauvaises personnes. Celles
qui clivent les gens de même patrie entre eux.
Les petites guerres qui se manifestent même sur la route
quand on intimide l'autre pour gagner une place dans le trafic imposant.
« Chacun-pour-soi, man. Moi, j'avance. Tasse-toi... »
Tant de mal et une
bouffée de bien
Vendredi midi. Je suis au Subway. Devant moi, une jeune dame
est là avec une jeune fille que j'imagine être sa fille. Elle est souriante.
Elle passe une commande qu'elle rapportera à la maison. Je reconnais le soin à
répondre aux goûts spécifiques de chaque personne à qui la commande servira.
Elle le fait avec une patience toute maternelle. La petite demande : « Est-ce
que c'est maintenant que je commande ? » « Non, tantôt. Juste au bout du
comptoir ». J'imagine que ce sera le grand moment pour elle de se commander un
appétissant biscuit aux pépites de chocolat ! Ou une autre gâterie qu'elle
appréciera visiblement.
Tout à mon affaire, je choisis les légumes et
accompagnements de mon petit sous-marin. Au moment où j'emprunte l'idée de me
gâter d'un biscuit, j'entends la maman dire : « Ah ! C'est pas grave...monsieur
redonnera simplement au suivant ! »
Je m'étonne et me questionne. La caissière me dit qu'elle
s'est trompée et a compté mon sandwich dans la commande de la dame. Comme la
facture était acquittée, ce que j'ai entendu était la réponse de la cliente : «
Ah ! C'est pas grave...monsieur redonnera simplement au suivant ! »
Je suis allé la voir alors qu'elle s'affairait à la fontaine
de boissons gazeuses. « Bien... Merci !
J'en fais une dette d'honneur ! » que je lui dis en souriant.
« C'est parfait ! Ça peut être ici, ça peut être ailleurs,
mais tant mieux si c'est utile ! », qu'elle me répond, tout aussi souriante.
Une drôle d'affaire,
pareil.
Pas juste le « donnez au suivant », mais le fait que mon
esprit, qui était navré et plus sombre de toutes ces images de guerres, de
tueries et de menteries, est maintenant déjoué par une éclaircie soudaine. Un
rayon de lumière dans un ciel bombardé.
Drôle d'affaire, parce que je l'ai en tête, maintenant. Ce
qu'elle a fait est une semence de petit bonheur. Un petit geste qui crée une
sorte de légèreté. Une sorte de vent d'optimisme. Les quelques secondes de
notre échange m'auront investi d'une heureuse mission. Que j'honorerai,
espérant qu'elle percole. On ne sait jamais !
Une heureuse mission
toute simple, mais pas banale.
Il y a les grandes guerres. Celles qu'on a la responsabilité
de connaître comme citoyens. Les guerres qui tuent des humains. Mais qui ne
tuent pas l'humanisme.
L'humanisme c'est l'espoir. L'espoir, dans ce cas, c'est la
prise de conscience qu'on peut faire une différence positive dans la vie de
l'autre, un petit geste à la fois.
Et sans penser qu'on sera honoré par un Nobel...
Clin d'œil de la
semaine
L'espoir, résumé dans les paroles de la chanson de Jean
Gabin, Maintenant je sais :
On oublie vite le soir
de tristesse
Mais jamais un matin
de tendresse