Arrivée dans la nuit du 4 mars, la seconde délégation médicale sherbrookoise n'a pas tardé à crier victoire. La mission a été un succès et, selon l'équipe, ses effets sur la communauté haïtienne seront durables. « C'est une mission qui a tapé dans le mille », a affirmé d'entrée de jeu le doyen de la Faculté de médecine et des sciences de la santé de l'Université de Sherbrooke, Dr Réjean Hébert.
L'un des objectifs de cette deuxième mission, dirigée par le Dr Robert Williams, était surtout de faire face à ce « désastre psychologique » qui sévit actuellement au pays. Si la pauvreté est visible à l'œil nu partout à Port-au-Prince, la peur, plus sournoise, fait elle aussi désormais partie du quotidien. « Il y a une sorte de "bétonophobie", explique le Dr Corbin. Beaucoup sursautent aux moindres bruits, font de l'insomnie. Les cas de stress post-traumatiques commencent à apparaître, surtout à cause de problèmes de deuils. » En trois semaines, le Dr Corbin et son collègue résident en psychiatrie ont fait un total de 350 consultations.
Toutefois, pas question de travailler en parallèle des Haïtiens. La délégation sherbrookoise est en effet la seule qui ait développé un partenariat avec le personnel de l'Hôpital de la Communauté haïtienne, bien que celle-ci hébergeait déjà plusieurs autres missions internationales. Sans barrière de langue ou presque, il est beaucoup plus facile d'établir un lien de confiance, admet le physiothérapeute Lionel Hugonnier. « Nous sommes arrivés avec une optique de travail différente. Nous leur avons dit :"Venez avec nous, nous allons travailler ensemble", a-t-il raconté. Il était important de faire un transfert de connaissances. »
Le médecin au CHUS, Dr Pierre Charron, abonde dans le même sens. « Nous sommes arrivés au bon moment, avec les expertises qu'il fallait. C'est très clair qu'on a fait une différence. On a travaillé avec une approche québécoise très différente », estime le Dr Charron. Simplicité et respect étaient les deux mots d'ordre, et la reconnaissance des Haïtiens était évidente, a-t-il souligné.
L'équipe québécoise avait également organisé une clinique externe et ce, dans tous les sens du terme! La clinique de médecine familiale, située en plein air, a permis à deux médecins, quatre infirmières de la délégation et quatre étudiants résidents haïtiens de soigner plus de 1300 patients et d'administrer 1600 traitements. « Il s'agissait surtout d'assurer la continuité des soins. Les cas étaient surtout des maladies infectieuses, comme la malaria », a expliqué le Dr Charron. Au dernier jour de la mission, le fonctionnement de l'hôpital avait toutefois repris son cours normal et succédait enfin au chaos des premiers jours.
Troisième mission en vue
De son côté, le Dr Réjean Hébert en est déjà à préparer une troisième mission. À l'instar des deux précédentes, la prochaine délégation sera créée selon les besoins du pays, qui évoluent en même temps que tous les efforts de reconstruction. Le Dr Hébert en est actuellement à développer un partenariat avec la Faculté de médecine de l'Université Quisqueya, qui souhaite reprendre les cours dès avril.
La prochaine délégation comprendrait donc une dizaine de spécialistes en pédagogie médicale et en technologie de l'information. Comme il n'y a aucune école de réadaptation en Haïti, l'Université de Sherbrooke souhaite non seulement un partage de connaissances, mais également des méthodes d'enseignement, par exemple la vidéo-conférence. « Nous souhaitons un partenariat à long terme », a précisé le Dr Hébert.
Photo : Dix des 14 membres de la mission étaient présents à la conférence de presse. Le chef de mission, Dr Robert Williams, absent de la photo, était déjà de retour à Amsterdam, où il habite pendant sa sabbatique.