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Le pays des licornes

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Daniel Nadeau Par Daniel Nadeau
Mercredi le 21 septembre 2022

 

Je l'ai écrit dans mes chroniques précédentes, l'actuelle campagne électorale québécoise est prévisible, convenue et divertissante. Elle est au diapason de ce que nous sommes. En fait, cette campagne électorale mériterait de faire l'objet de recherches par les sociologues tant elle est révélatrice de notre époque. Je suis persuadé que les historiens de demain auront pour objet de recherche ce moment que nous vivons comme un point de bascule où la démocratie libérale se sera transformée. C'est pour moi un objet de curiosité d'un incroyable intérêt.

La dernière semaine écoulée ne vient pas contredire mon sentiment. Nous avons droit au cirque ordinaire d'une campagne électorale au 21e siècle au Québec. Le débat sur le débat fait rage. Le réseau TVA et ses thuriféraires patentés cherchent à convaincre, cote d'écoute à l'appui, que le Face-à-Face entre les chefs diffusés sur leurs ondes a été déterminant. Les sondages d'opinion se contredisent, le cirque politique est à son paroxysme. Pourtant la population demeure dubitative. Elle se demande si elle doit croire à celles et à ceux qui dépensent notre argent sans compter ou qui souhaitent augmenter nos taxes pour nous obliger à modifier nos comportements afin de sauver la planète sans nous dire que ce qu'il souhaite au fond c'est la fin de notre mode de vie actuel pour être remplacée par un monde nouveau de partage, de solidarité et d'humanité. Nous votons tous pour l'épiphanie d'un monde meilleur et plus juste. Cela va de soi. Retour sur le cirque d'une campagne électorale étonnante et ma foi décevante.

Les chefs en performance

La dernière semaine aura été marquée par la diffusion du Face-à-Face sur les ondes du réseau TVA jeudi soir dernier. Événement soigneusement mis en scène tant par les participants que par le diffuseur. Tapis rouge, accueil des chefs, diffusion de photos prédébat, retour de la grande vedette Pierre Bruneau sorti de sa retraite, émission d'avant-match, d'après match avec la période de questions des chefs. Nous allons voir et sentir l'état des lieux dans le vestiaire. Puis, les jours qui suivent, nous avons droit au débat sur le débat qui aux dires du sondeur Jean-Marc Léger est un moment crucial de la campagne. Le moment où nous nous formons vraiment notre opinion qui sera porteuse du choix du Québec pour son avenir.

Le débat qui a eu lieu est à mon avis le pire débat face à face de l'histoire. Un débat ou le format ne convient plus à la présence de cinq candidats. Le temps imparti aux échanges pour chacun des chefs accentue la nécessité de le transformer en concours de clips de 15 à 20 secondes. D'ailleurs, les analystes ne retiennent que des impressions fugaces et des clips comme celui de Nadeau-Dubois utilisé contre Duhaime « vous devriez vous présenter au Texas » alors que celui-ci a rétorqué qu'il avait la « gentillesse de ne pas lui suggérer de se présenter à Cuba. » En un coup de cuillère, les deux protagonistes venaient d'étiqueter son adversaire, l'un accusant l'autre d'être de droite ou de gauche. Il y a aussi cet échange entre Legault et Duhaime où l'un accuse l'autre d'être le plus grand « confineur » de l'histoire, normal il n'y a pas eu de pandémie depuis plus de 100 ans alors son adversaire rétorque que pendant que tous ramaient dans le même sens, lui « il lançait une roche dans le fond de la chaloupe. » Cela ne nous apprend rien sur le contenu des programmes des partis politiques en présence. Ce sont des effets de toge, des clips qui font de la bonne télé, mais de la mauvaise politique.

Dans cette cacophonie assourdissante, il y avait de quoi perdre son attention pour un électeur moyen. De mon point de vue, le grand gagnant de ce débat a été Paul St-Pierre Plamondon qui a été de loin le plus posé, le plus rassembleur et celui qui a cherché à respecter notre intelligence collective. Son problème c'est que son argumentation tournait court puisque la solution à tous nos problèmes c'est de faire l'indépendance du Québec. Le pays du Québec remède à tous nos problèmes. Fallait y penser.

Gabriel Nadeau-Dubois a été excellent dans le rôle du premier de classe, arrogant et à la limite fendant, mais pas plus que les autres il n'a pas répondu aux questions fondamentales que posent son programme politique. Quels sacrifices, quelle facette de notre mode de vie remet-il en question par sa volonté de lutter contre les changements climatiques ? On n'a pas dénoté chez Nadeau-Dubois l'honnêteté minimale que l'on retrouve chez les vrais écologistes qui nous disent que lutter contre les changements climatiques c'est mettre fin à l'autosolo, à l'habitation dans des maisons unifamiliales, à une alimentation carnée et j'en passe. Tout cela sans que personne ne réponde vraiment à la vraie question qu'est l'impact de ses sacrifices que nous ferions collectivement sur le sort de la planète aux prises avec la lutte aux changements climatiques. Les statistiques par personne de production de gaz à effet de serre obscurcissent le fait tout simple que le Québec comme territoire, somme toute, fait mieux en cette matière que tous les États américains et toutes les provinces canadiennes. Ça, monsieur Legault a eu le mérite de le rappeler.

Au prix de la meilleure performance à la production de la cacophonie, la cheffe libérale Dominique Anglade a remporté les grands honneurs suivis de près par Gabriel Nadeau-Dubois et Éric Duhaime. Les plus posés et polis ont été sans conteste le premier ministre Legault, mais la palme du respect de l'autre est remportée par le chef du Parti québécois Paul St-Pierre Plamondon. Je ne sais pas pour vous, mais moi je n'ai rien appris de ce débat sur mon choix. La formule est à revoir.

En région pendant ce temps

Chez nous en Estrie, la campagne s'est aussi mise en marche. Il y a eu aussi un débat à la Chambre de commerce et de l'industrie au Club de golf de Sherbrooke, débat diffusé sur les ondes de la radio locale de Cogeco. Un débat qui avait une bien meilleure tenue que celui de TVA du lendemain. Je l'ai écouté en différé, car au moment du débat je ne pouvais être présent. Il n'y a pas eu de cacophonie. Félicitations à Martin Pelletier pour son animation et pour la pertinence des questions. Ce débat a révélé que la candidate du parti conservateur, Zoé Saint-Amand, était mal préparée et ne connaissait pas vraiment ses dossiers, que le candidat libéral François Vaes était plutôt sur le mode agressif, alors que la candidate de la CAQ, Caroline St-Hilaire connaissait très bien les enjeux de notre région et de la ville et faisait preuve de beaucoup d'expérience.

Le débat a aussi révélé que la députée sortante et candidate de Québec solidaire, Christine Labrie, était dévouée à son travail de militante professionnelle à Sherbrooke, mais qu'elle n'était pas une représentante de tous, elle n'a jamais rencontré la Chambre de commerce et de l'industrie en quatre ans par exemple. Le candidat du parti québécois, Yves Bérubé-Lauzière a très bien fait et il est apparu comme un homme intelligent aux propos sensés. Il n'y a pas eu de gagnants ou de perdants à ce débat, mais les gens présents et à l'écoute ont appris sur la position des différents partisans en lice dans le comté de Sherbrooke.

Au moment où cette chronique est écrite (dimanche 18 septembre), j'apprends la nouvelle la plus stupéfiante de la campagne au Québec. Québec Solidaire a promis de dépenser 4,2 milliards pour développer deux lignes de tramway et neuf lignes d'autobus à haute fréquence. Je suis sidéré. Personne n'a jamais évoqué cela à Sherbrooke. La Ville de Sherbrooke dans son plan de mobilité durable n'a jamais évoqué un projet. On vient nous plaquer un projet coûteux dont il n'existe aucune étude sérieuse sur l'opportunité, la faisabilité et sa rentabilité. Les solidaires devraient ressortir leur rhétorique sur le troisième lien. Celle-ci pourra servir à invalider ce projet farfelu pour une ville comme la nôtre. En quoi investir dans un réseau d'autobus électriques avec voies réservées, qui seraient selon moi beaucoup moins coûteux et plus adaptés à une ville de la taille de Sherbrooke, est moins efficace pour diminuer les gaz à effet de serre qu'un ésotérique tramway. Au moins si on en parlait comme attraction touristique. Nous vivons vraiment au pays des licornes.


 


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