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L’enfer c’est les autres !

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Daniel Nadeau Par Daniel Nadeau
Mercredi 11 juin 2025

Que l'on me permette ce matin de trahir le sens d'une phrase culte de Jean-Paul Sartre, l'ami-adversaire de mon auteur fétiche Albert Camus, pour aborder avec vous le sujet de l'immigration au Québec. À l'origine, cette tirade de Sartre est tirée d'une réplique de la pièce de théâtre Huis Clos. Cette pièce de théâtre a été écrite en 1944 et elle met en scène trois personnages, Garcin, Inès et Estelle, qui se retrouvent dans une salle de tortures pour l'éternité, sans porte de sortie. Ce qui attend les protagonistes n'est pas la souffrance physique, mais plutôt le jugement éternel de leurs actions passées, principalement fondé sur le regard des autres. Au cours de la pièce, les personnages se révèlent progressivement, exposant leurs faiblesses, leurs tromperies et leurs égoïsmes. Cela permet à Sartre d'explorer des thèmes tels que la culpabilité, l'identité et la nature de l'enfer. En fait, tout cela n'est que prétexte pour Sartre de dénoncer la tension entre le soi authentique et le soi façonné par le regard des autres. C'est cette tension qui constitue pour l'auteur un état de souffrance psychologique qui constitue l'enfer. Ce que je retiens cependant, c'est que le regard de l'autre, la recherche d'approbation peut devenir une forme de souffrance ou d'enfer qui empêche l'épanouissement en étant prisonnier de notre incapacité à échapper au regard du monde.

Voilà le contexte nécessaire pour aborder la volonté du gouvernement Legault de réduire significativement le nombre d'immigrants afin de se conformer à l'idée fausse accréditée par plusieurs que les immigrants sont un problème pour le Québec alors que c'est plutôt une solution. Il est vrai que pour le nationalisme québécois, la relation avec l'immigration est un rapport trouble que les actions de l'ancien ministre Gérald Godin n'ont jamais pu effacer et que nous rappellent malheureusement les propos malheureux d'un Jacques Parizeau sur des votes ethniques et l'argent. Réfléchissons ensemble sur la question du nationalisme québécois et de l'immigration.

La question de l'immigration et le nationalisme au Québec

Le nationalisme québécois, forgé dans l'histoire et l'identité distincte de la province de Québec, est intrinsèquement lié à une quête de reconnaissance et de préservation culturelle. Cependant, cette quête se heurte souvent à des enjeux contemporains, notamment l'immigration. La difficulté du mouvement souverainiste à intégrer les nouveaux arrivants est révélatrice d'une relation complexe entre le nationalisme, l'identité québécoise et la peur de l'autre. Les nouveaux arrivants, souvent perçus comme ayant une première fidélité au Canada, semblent menacer la souveraineté et l'identité nationale québécoise.

Le nationalisme québécois émerge au 19e siècle, dans un contexte où les Canadiens français cherchaient à défendre leur position devant la domination anglophone. Ce mouvement s'est intensifié au fil des ans, en particulier après la Révolution tranquille des années 1960 qui a engendré une prise de conscience identitaire et une volonté d'autodétermination. Le nationalisme québécois s'est alors manifesté par une série de luttes politiques et sociales pour la protection de la langue française et des droits des francophones. Cela a donné une importance démesurée à la quête de l'identité québécoise.

La question de l'identité

L'identité québécoise repose sur des éléments culturels, linguistiques et historiques qui lui sont propres. L'élément linguistique est central, la langue française est souvent considérée comme le fondement de la culture québécoise. Dans ce contexte, l'arrivée de nouveaux arrivants, souvent francophones ou anglophones, soulève des interrogations quant à leur intégration et à leur fidélité à la culture dominante.

L'immigration au Québec a considérablement augmenté dans les dernières décennies, façonnant un paysage culturel de plus en plus diversifié. Les nouveaux arrivants apportent des compétences, de l'innovation et un enrichissement culturel indéniable. Cependant, ce multiculturalisme offre aussi des défis pour ceux qui défendent une vision plus ethnocentrique de l'identité québécoise.

Au cœur du rejet de certains nouveaux arrivants par une partie du nationalisme québécois se trouve la peur de l'autre. Ce sentiment peut se traduire par des préoccupations sur la dilution de l'identité nationale, le déclin de la langue française et la perte de valeurs. Cette peur est exacerbée par une méfiance à l'égard des intentions politiques et culturelles des immigrants, perçus comme des acteurs potentiellement clivants.

Pour certains souverainistes, les nouveaux arrivants sont vus comme des individus dont la loyauté première est canadienne plutôt que québécoise. Ce sentiment est nourri par une vision dichotomique où l'immigrant est souvent perçu comme un « ennemi » potentiel de l'État souverain, susceptible de saper la légitimité d'une éventuelle indépendance.

Les discours politiques autour de l'immigration, notamment au sein des partis souverainistes tels que le Parti québécois (PQ), oscillent souvent entre l'accueil des talents et la défense des valeurs québécoises. Cette ambivalence génère une tension palpable, où l'immigration est parfois instrumentalisée pour renforcer les revendications souverainistes, tout en demeurant un sujet de débat interne problématique.

C'est ce jeu politique qui se déroule présentement sous nos yeux, puisque la Coalition Avenir Québec cherche à laver plus blanc que blanc pour se préparer à affronter le PQ de Paul St-Pierre Plamondon l'an prochain. Derrière les faux-fuyants de la crise du logement et de l'incapacité pour le Québec d'offrir des services publics, l'immigrant devient notre enfer sartrien, soit l'incapacité à faire face à l'absurde des positions politiques. La seule voie royale pour se sortir de cet enfer, c'est une vraie réconciliation autour d'une intégration réussie des immigrants. Ce n'est pas une question de nombre, mais d'accueil et de savoir-faire.

Accueillir plus et mieux

Les aspects de l'intégration sont cruciaux pour favoriser un climat de confiance entre la société d'accueil et les nouveaux arrivants. Pour les souverainistes, un effort concerté en matière de langue et de culture peut servir de pont entre les différentes communautés, atténuant ainsi les peurs et les préjugés.

Le changement dans la perception des immigrants pourrait nécessiter un éloignement des discours de peur et de méfiance. En promouvant une vision inclusive du nationalisme québécois, qui embrasse la diversité tout en célébrant l'essence de la culture québécoise, il est possible de réconcilier les aspirations à la souveraineté avec les réalités de l'immigration. Heureusement, le Québec peut aussi compter sur une voie plus canadienne comme celle des Libéraux du Québec pour se préserver de l'enfermement souverainiste sur l'immigration.

Aller de l'avant

La relation trouble entre le nationalisme québécois et l'immigration est symptomatique des défis contemporains liés à la construction identitaire. La peur de l'autre, bien que fondée sur des préoccupations légitimes d'un nationalisme à une voix, ne doit pas devenir un frein à l'intégration des nouveaux arrivants. Pour avancer vers un Québec hospitalier et accueillant, il est essentiel de redéfinir le discours politique autour de l'immigration, en cherchant à intégrer plutôt qu'à exclure, en célébrant la richesse que chaque nouvel arrivant peut apporter à la mosaïque que constitue la nation québécoise.

Il faut combattre ces discours de rapetissement mettant en lumière la peur de l'autre qui freine l'intégration. Il faut une approche plus inclusive. La véritable force du Québec réside non seulement dans sa capacité à se définir comme nation, mais également dans sa capacité à embrasser et à intégrer la pluralité qui le compose. C'est la seule voie qui s'offre à nous pour éviter que l'enfer soit les autres... 

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