Avec son essai Boys' Club, Martine Delvaux est certaine de faire discuter d'elle dans les cercles de pouvoir. Sans ménager les sensibilités, l'autrice aborde crument la notion de cercles de pouvoir, maintenus depuis que le monde existe, par les postures collectives des hommes.
Serti d'une documentation abondante et diversifiée, le livre porte un regard critique sur des siècles de domination et tente une explication pour mieux cerner pourquoi ces comportements se perpétuent à ce jour.
« C'est d'une part la collectivité des hommes, et d'autre part le fait qu'ils fonctionnent "ensemble", qu'ils sont tournés les uns vers les autres, qu'ils défendent les intérêts les uns des autres », dit Martine Delvaux. « Le boys' club est un dispositif, c'est-à-dire une structure, une organisation, un système, qui se déploie dans des lieux précis, permettant l'installation et l'exercice du pouvoir masculin (en particulier blanc et hétérosexuel) ».
Mme Delvaux fait également des parallèles avec un essai précédent Les filles en série : de Barbie aux Pussy Riots, livre qui analyse la façon de le corps des femmes est montré, affiché, transformé en objet de perfection; et de celles qui refusent d'adhérer à ce que leur corps ne soit décrit comme l'essentiel de ce qui les définit.
Inconsciemment, c'est la société entière qui s'est plié à ces modèles de dominance. Les femmes, les homosexuels, les personnes racisées, ou tout individu sortant du cadre, sont exclus de facto du club. Malgré certaines avancées au cours des dernières années, force est d'admettre que les exemples de boys' club demeurent nombreux, et dans toutes les sphères où une forme de pouvoir est impliquée. La notion de ‘'plafond de verre'' n'est pas sur le point de disparaître selon la professeure en études féministes à l'UQAM. Elle dit espérer que des mouvements comme avec moiaussi, vont créer des brèches et permettre à une plus grande diversité d'individus d'accéder aux cercles de pouvoir.
« Ça demande que les groupes exclus soient des alliés - que les femmes soient solidaires pour sortir du "syndrome de la Schtroumfette"; syndrome marqué par l'idée que tous les Schtroumfs la désirent et la détestent à la fois. Il faut refuser un système où on élit une seule femme à l'intérieur du boys club, c'est une manière de se donner bonne conscience et de faire croire qu'il n'y a plus de sexisme alors que ce n'est pas le cas », met en garde Mme Delvaux.
L'autre chapeau que porte Martine Delvaux est celui de romancière. Elle a publié des romans, dont Blanc dehors (Héliotrope, 2015), finaliste au Prix des libraires et aux prix du Gouverneur Général, mais aussi Les cascadeurs de l'amour n'ont pas droit au doublage (Héliotrope, 2011), Rose amer (Héliotrope, 2009) et C'est quand le bonheur ? (Héliotrope, 2007). Son dernier roman Thelma, Louise, et moi (Héliotrope, 2018), sélectionné pour le prix des Libraires 2019, retrace sa condition et son parcours de femme à travers des scènes du film qui a marqué l'autrice au fer rouge. Les questionnements sur ce que vaut la vie d'une femme, son statut et les limitations qu'il lui impose.
Même si sa vie sert de toile de fond pour ses romans, Mme Delvaux laisse tout de même une place particulière à son imaginaire dans la construction des scénarios de ceux-ci. « Mon imaginaire, je l'utilise dans ma façon de raconter l'histoire. Comment et où je mets en scène mes personnages, ou la description d'un moment par exemple ».
L'œuvre de Martine Delvaux est définitivement tourné vers le sort des femmes. Consciente que cela créer parfois des remous et du ressentiment, elle n'en demeure pas moins déterminée à démystifier, expliquer, et par-dessus tout améliorer la condition de celles-ci, en dressant le miroir; geste nécessaire si on veut véritablement devenir une société égalitaire.
Martine Delvaux sera l'une des panelistes présentes au Salon du Livre de l'Estrie qui se tiendra du 17 au 20 octobre prochain.
Programmation : salondulivredelestrie.com