Pour l'enseignant d'univers social Robert Gauthier, enseigner devient tout un défi lorsque vient le temps de parler de la crise syrienne, des répercussions et des solutions qui s'offrent aux grands dirigeants du monde : cette crise ne peut se comparer à rien d'autre dans l'histoire du monde.
« Nous sommes entrés dans une ère de terrorisme à la suite des attentats de New York le 11 septembre 2001, puis dans une ère de terrorisme 2.0 avec le développement fulgurant des technologies de l'information, explique l'enseignant de l'école La Montée de Sherbrooke. On s'est en plus rendus compte que les réseaux sociaux étaient un outil révolutionnaire de propagande et que même avec les preuves indéniables de cruauté et de violence du mouvement, cela n'empêche pas les jeunes d'en joindre les rangs! »
Les jeunes Sherbrookois et les réfugiés
Les informations que ses élèves rapportent à l'école sont celles qu'ils entendent à la télévision et dont leurs parents discutent. Selon M. Gauthier, ceux-ci restent la plus grande influence dans leur vie. Toutefois, il convient selon lui de rectifier certaines choses lorsqu'on parle de la crise syrienne, ou de l'État islamique.
C'est pourquoi il a tenu à organiser cette conférence de Georges Mourani, impliqué au sein de l'église syriaque orthodoxe St-Éphrem, et de Mercedes Orellana, directrice générale du Service d'aide aux néo-canadiens, vendredi dernier.
« Beaucoup de choses se disent et le conflit est si complexe que la solution ne réside pas en deux ennemis. Il y a là des intérêts détenus par d'autres États et des populations qui se retrouvent coincées au centre des tirs croisés, souligne l'enseignant. On dit que l'État islamique est responsable, mais en réalité, la crise durait depuis plusieurs années avant qu'il ne s'impose en Syrie, en 2013. »
Ses élèves ont-ils des craintes vis-à-vis des réfugiés?
« La majorité d'entre eux est ouverte mais ils sont à la fois craintifs, comme tous les autres. On entend parler que des terroristes se cachent parmi les réfugiés et les récents événements en France n'aident en rien à enrayer cette conception. Toutefois, ils sont conscients que les réfugiés n'ont pas quitté leur pays de gaieté de cœur, affirme-t-il. Nous sommes nous-mêmes confrontés à nos propres peurs et à nos manques. Si nous avions la solution, nous serions déjà allés la présenter aux Nations Unies! En entendant parler des acteurs qui sont sur le terrain, on arrive à éliminer certaines conceptions, mais c'est sûr qu'on ne règle pas tout. »
Une petite souris qui parvient à se faufiler
Pour lui, « la Syrie est la souris que les gros États ne sont pas capables d'attraper : ils se dressent les uns contre les autres et la souris file entre leurs pattes. Les intérêts des gros États du monde sont plutôt responsables des tensions dans les régions du monde fragilisées », selon Robert Gauthier.
Il y a quelques années, il enseignait que 10 % des plus riches du monde possédaient plus que les 90 % des autres.
« L'aggravation des inégalités fait en sorte qu'aujourd'hui, le un pourcent des plus riches possède plus que les 99 % restants. Je pense que le terrorisme est une réponse à ce phénomène, que c'est la réponse qu'ont trouvé quelques-uns de ces exclus économiques. Qu'est-ce qui arrivera et comment on gèrera cela, je ne sais pas », affirme M. Gauthier.
Mais il reste que ce bouleversement effrite les fondements des grands.
« L'Union européenne se questionne déjà à savoir si elle survivra à ces grands changements qui commencent à s'opérer. Elle a remis en question les préceptes qui sont à sa base-même! Si elle survit à cette crise, on arrivera peut-être à une étape où on sera plus sensible à la répartition de la richesse et du pouvoir dans le monde », estime l'enseignant.