Samedi matin. Le soleil matinal s'est emparé de la pièce
dans laquelle un café accompagne nos lectures du matin.
Ma blonde me dit : « Tu as vu ça, l'histoire de la sénatrice
québécoise et de ses cours d'anglais à Vancouver ? »
« Ah ! Cibole... »
Je vous résume l'affaire, si vous l'avez manquée. Deux
sessions de 5 jours de cours d'anglais sur deux ans : 22 000 $. La sénatrice a
consulté le règlement qui prévoit des frais de déplacement avec conjoint (pour
la proximité familiale). Alors, avion de Montréal à Vancouver, deux fois, en
classe affaires et remboursement des dépenses encourues. « C'est permis,
rétorque la sénatrice. » Deux sessions de 1500 $ chacune qui coûtent finalement
22 000 $ au total.
Une dernière bouffée de colère s'invite : « J'imagine qu'il
n'y a pas de cours d'anglais au Québec ? Et la classe affaires, c'est pour
favoriser la proximité familiale ? »
C'est l'anecdote de trop.
Quand on n'a pas le jugement nécessaire pour éviter ce type
de dépenses sous le seul prétexte que ce n'est pas défendu, je me demande
comment on peut prétendre représenter des contribuables.
L'anecdote de trop,
tu dis ? Une anecdote ? Vraiment ?
22 000$, ce n'est pas anecdotique. C'est une question de
perception, je dirais. À travers le scandale SAAQclic, l'abandon ou le report
de deux projets d'informatisation à Santé Québec, projets non terminés qui ont
déjà coûté le double des 350 millions $ prévus, le 22 000 $ fait figure de
petit change.
Je constate que l'énergie nécessaire pour rester en colère
n'est plus là, pour moi. Elle essaie de revenir à la surface, mais elle quitte
rapidement, déboutée. Laissant place au pire des scénarios : le dépit.
Parce que, à la fin, ce qui reste, c'est le dépit. Celui qui
s'est installé et qui s'est exprimé par un « Ah ! Cibole... » tristement
dubitatif.
L'affaire de la sénatrice est donc l'anecdote qui fait
déborder un vase plein à ras bord. Qui fait retentir une alarme que personne ne
semble percevoir.
Mark Carney change les règles du jeu environnemental sous le
sceau de l'urgence. François Legault vire à droite et bouscule les normes
environnementales sous le sceau de la même urgence. Quand on nomme Bernard
Drainville à l'Environnement, c'est qu'on croit qu'il n'y a pas d'enjeux
climatiques.
Les derniers gouvernements du Québec ont été incompétents à
mettre en place des structures gouvernementales contrôlées sérieusement. Les
témoignages entendus à la commission SAAQclic ont montré que tout est
nécessairement la faute de l'autre. Personne n'est redevable de quoi que ce
soit.
Et le site SAAQclic ne fonctionne toujours pas bien...
Au moment où je sens le fond du baril poindre, Éric Duhaime
fait un vibrant plaidoyer contre les mesures environnementales. Je résume son
intervention : on ne représente, au
Québec, que .07% des émissions totales de gaz à effet de serre mondiales. Quand
les autres feront de quoi, on fera de quoi. Pas avant. D'ici là, go ! Le bar
est ouvert !
C'est cette logique qui alimente mon dépit. Logique dans
laquelle tout est comparé à une échelle beaucoup plus grande. Exemple simple :
« Ben oui, je nettoie ma cour avec de l'eau courante potable. Mais ce soir,
est-ce que la planète ira moins bien que ce matin ? Non ? Bon, ben, je
continue ! »
C'est la même logique qui semble animer la sénatrice : 22
000 $, dans une enveloppe de dizaines de milliards de dollars, ça va tout
chambouler ? Non ! Bon, bien fais tes valises, mon amour, les contribuables
nous paient la classe affaires!
Dépit.
Dangereux dépit...
Clin d'œil de la
semaine
En 2026, c'est un dépité qui ira voter pour le choix d'un
député...