Dans moins de trois mois, nous serons appelés à élire des
femmes et des hommes pour nous représenter et former le prochain conseil
municipal de la ville de Sherbrooke. La campagne électorale commencera sous
peu. Ces femmes et ces hommes, regroupés dans un parti ou non, visiteront nos
foyers, feront des déclarations aux médias pour nous dire en quoi elles ou ils
seront nos meilleurs représentants à l'hôtel de ville de Sherbrooke. Nous serons
alors appelés à faire nos choix en traçant une marque sur un bulletin de vote
le premier dimanche de novembre 2017. C'est le temps des élections.
Comme le chantait Félix Leclerc, il faut se rappeler ce que
sont les élections. Nous ne pouvons mieux traduire à notre avis le scepticisme
et l'incrédulité des citoyennes et des citoyens envers leurs élus que les
paroles de la chanson Attends-moi tit-gars, chanson écrite en 1962 par Félix
Leclerc, notre plus grand poète et troubadour national :
« La veille des élections
Il t'appelait son fiston
Le lendemain comme de raison
Y'avait oublié ton nom.
Attends-moi, ti-gars,
Tu vas tomber si j'suis pas là
Le plaisir de l'un
C'est de voir l'autre se casser le cou... »
Ils ont peut-être oublié nos noms, mais là, nous sommes dans
la période où ils se souviendront de nous, car de nombreuses femmes et de
nombreux hommes chercheront à nous convaincre de leurs visions et de leurs
compétences pour obtenir notre confiance et devenir ainsi conseillères,
conseillers, mairesse ou maire de notre ville. Plus que les paroles, les
engagements électoraux, la vision qui nous sera proposée de l'avenir devra être
l'élément déterminant de nos choix électoraux. Cette vision devrait répondre aux
défis de l'avenir de Sherbrooke. La série de chroniques que j'ai écrites sur
l'avenir de Sherbrooke depuis le 19 juillet dernier se veut une contribution
intellectuelle à ce choix. Place aux défis de l'avenir de Sherbrooke.
La responsabilité
fiscale
À chaque élection, c'est toujours pareil. Les nouveaux qui
veulent remplacer les gens qui sont en poste promettent de gérer mieux les
finances de la ville. Les promesses de geler ou diminuer les taux de taxation,
de réduire les dépenses en éliminant les postes inutiles et la volonté de faire
mieux avec moins sont toujours des sujets importants dans les campagnes
électorales municipales.
Nous avons les meilleurs taux de taxation parmi les villes
de même taille et nous dépensons moins et mieux que la plupart des villes de
plus de 100 000 habitants. En fait, Sherbrooke se situe au 6e rang des dix plus
grandes villes du Québec en matière de taxation. Ce qui fait de notre ville une
sorte de candidate de milieu de peloton. Certes, on peut toujours améliorer les
choses, mais la réalité est que notre ville est responsable sur le plan fiscal.
Elle l'était au temps des maires Jacques O'Bready, Jean-Paul Pelletier, Paul
Gervais, Jean Perrault, Bernard Sévigny, Steve Lussier et Évelyne Beaudin.
Attaquer l'administration actuelle sous l'angle des dépenses inutiles et d'une
gestion déficiente est un combat perdu à l'avance même si ce combat est celui
de certains conseillers et d'une frange de la population qui disent n'importe
quoi sur un mode populiste qui se nourrit de l'ignorance des gens.
Si nous voulions prendre un engagement réaliste et crédible
à ce sujet, cela devrait être de maintenir la Ville de Sherbrooke dans le
premier tiers des villes de plus de 100 000 habitants en matière de taxation,
de salaires versés à ses employés, de dépenses par habitant, de dettes, etc. Ce
que nous réussissons d'année en année.
On ne peut ni ne doit comparer le taux de taxation de
Sherbrooke à des petites villes ou à des municipalités qui n'ont pas les mêmes
responsabilités.
Le développement
économique
S'il y a un sujet qui devrait préoccuper les citoyennes et
les citoyens de cette ville, c'est la question du développement économique. Où
s'en va notre développement ? Qu'en est-il de la stratégie des filières clés
dont on n'entend plus parler ? Comment faire de Sherbrooke un lieu
d'innovation, de recherche et de développement entrepreneurial ? Nos
entreprises manufacturières exportent-elles suffisamment ? Avec la crise des
tarifs imposés par notre voisin du Sud, Sherbrooke a-t-elle une stratégie de
rechange pour nos entrepreneurs ?
Quelle est la stratégie de nos futurs élus quant au
positionnement de Sherbrooke eu égard au nouveau traité de libre-échange avec
l'Europe et à la nouvelle réalité sous Trump de l'ACEUM ? Qu'entend-on mettre
en place pour faire de l'agriculture urbaine une voie d'avenir ? Pourrait-on
utiliser la marge de manœuvre que nous donne la propriété d'Hydro-Sherbrooke
pour aider la culture en serre de légumes, de fruits, de marijuana ? Que
proposons-nous de faire avec tous nos cerveaux en matière de développement de
l'économie de données qui tend à s'accroitre chez nous ? Voilà autant de
questions auxquelles il faudra s'attendre des réponses de nos candidates t de
nos candidats à la mairie.
La démocratie et le
pouvoir citoyen
Ces dernières années, on observe beaucoup d'appétit de
nombreuses citoyennes et de nombreux citoyens pour participer à la vie
démocratique de notre ville. Que fera le prochain conseil municipal pour
favoriser l'expression citoyenne et une plus large participation de toutes et
de tous à la vie démocratique municipale ? À quand une ville avec des données
ouvertes que toutes et tous pourraient consulter à loisir sans se retrancher
derrière la Loi sur l'accès à l'information ? Peut-on envisager une ville qui
pratiquerait, dans le cadre d'une expérience pilote, le vote consultatif de
toutes les citoyennes et de tous les citoyens pour les projets importants, les
dossiers structurels en aménagement urbain et pour les décisions budgétaires ?
Les nouvelles technologies de l'information permettraient de
tels votes. Les élus qui sont nos personnes désignées pourraient voter, mais en
ayant l'éclairage de leurs commettants. Ne serait-ce pas une avancée importante
permettant de mieux concilier la démocratie représentative avec la démocratie
participative ? Ce serait beaucoup mieux que de chercher à abolir les vieux
référendums sur le zonage par une nouvelle « patente » de démocratie contrôlée
par des élus trop frileux pour jouer à plein la démocratie participative. Qui
plus est, à quand des organismes de développement contrôlés par des citoyennes
et les citoyens plutôt que par des élus qui veulent les présider à tout prix ?
Pourquoi ne pas faire des organismes consultatifs de véritables lieux de
pouvoir citoyen ? Je crois que renouveler la démocratie municipale est l'un des
plus grands défis de notre avenir.
La culture, le sport
et la qualité de vie et la mixité de la population
Sur le plan du développement culturel et sportif, on peut
dire que Sherbrooke n'a pas beaucoup à envier aux villes de même taille au
Québec. Nous avons accès à des infrastructures culturelles et sportives, tant
privées que publiques, de très grande qualité. La construction de la nouvelle
salle de spectacle pour les jeunes publics vient compléter nos ressources. Il
faut en féliciter tous nos conseils municipaux qui se sont passés le relais
dans ce dossier qui a traîné de longues années.
Sur le plan de la qualité de vie et de la mixité de la
population dans les quartiers, il y a cependant du travail à faire afin
d'améliorer la situation. L'un des graves problèmes parmi ceux qui nous
attendent pour l'avenir est la coexistence de populations jeunes et âgées dans
un même cadre urbain. La population de Sherbrooke est composée de 25 % de
jeunes, étudiantes et étudiants et devient de plus en plus le choix d'un lieu
de vie pour de nombreux retraités québécois. Or, ces populations n'ont pas les
mêmes besoins et ne vivent pas la même ville. Les problèmes liés au quartier
universitaire avec la présence des étudiantes et des étudiants qui font la fête
ou ceux du transport avec la STS sont des épiphénomènes de ce problème à venir.
Un problème qui viendra complexifier davantage notre vivre ensemble qui sera de
plus en plus coloré dans l'avenir avec l'apport de nouveaux immigrants. Un défi
important pour repenser notre ville.
Une ville verte à
taille humaine
Nous vivons dans une période où de profondes transformations
ont cours. À notre époque, les projets de développement urbain doivent
emprunter de nouveaux sentiers. Il faut que la ville soit vécue autrement. Il
faut faire place dans notre développement urbain à des modes de transport
différents. Il importe de redonner la ville aux piétons, aux cyclistes et de
favoriser une meilleure cohabitation de tous les modes de transport. À cet
égard, l'administration de la mairesse Évelyne Beaudin a fait beaucoup avancer
le dossier de mobilité durable. Ce fut l'une de ses grandes réalisations. Je
suis donc d'avis que la ville de Sherbrooke va dans la bonne direction en ces
matières. Le quartier Well inc. au Centre-ville de Sherbrooke est un bel
exemple de planification urbaine mettant en valeur la mixité de la population
et le développement d'une économie à valeur ajoutée. Sherbrooke doit devenir
une ville intelligente. Une ville à taille humaine qui appartient à ses
citoyennes et à ses citoyens. Un défi majeur pour notre avenir.
Une vision d'avenir
Le défi le plus important de tous est la vision que
proposeront les différents candidats quant à notre avenir. Voulons-nous vivre
dans une ville qui ne connaîtra pas une importante croissance démographique où
nous voulons augmenter notre taille ? Souhaitons-nous que Sherbrooke soit l'une
des trois régions urbaines du Québec avec Montréal et Québec où préférons-nous
plutôt être une petite ville tranquille et peinarde ? Sherbrooke, doit-elle
s'imposer comme un lieu important d'entrepreneuriat au Québec où l'important,
c'est de maintenir nos emplois existants sans en créer de nombreux autres.
Désirons-nous poursuivre le développement immobilier ou commercial de la ville
en cherchant un meilleur équilibre de tous les quartiers ou préférons-nous le
statu quo et une ville dont le développement se décide selon les humeurs du
moment ?
Néanmoins, Sherbrooke doit devenir une ville à taille
humaine, appartenant à ses habitants, une ville intelligente qui carburera à
l'économie du savoir et qui sera capable de devenir une ville avec des
pratiques démocratiques novatrices qui en feront un centre urbain majeur au
Québec, le troisième pôle urbain avec Montréal et Québec. Sherbrooke doit
devenir le phare de notre avenir commun. Soyons attentifs lors de la prochaine
campagne électorale aux propos des uns et des autres. Faisons notre choix en fonction
des questions et des réponses qui seront données aux défis qui se posent à
notre avenir. La question qui se pose est : qui sera en mesure de relever les
défis de l'avenir ?