L’essor des jeux d'argent en ligne a provoqué une refonte totale des systèmes de réglementation des gouvernements. Au Canada où la majorité des provinces fonctionnent encore sous les modèles de monopole, les jeux d'argent illégaux dominent les statistiques. Pour l’Association Canadienne du Jeu, il est temps de penser autrement et de réglementer le secteur du jeu en ligne.
Les jeux d'argent illégaux accaparent le marché au détriment des monopoles provinciaux
Au Canada, les jeux de hasard et d'argent en ligne sont illégaux sauf s'ils sont supervisés ou exploités par une province. Pourtant, depuis des décennies, les jeux d'argent illégaux en ligne se sont imposés dans le quotidien des canadiens. Pour Paul Burns, président de l’Association Canadienne du Jeu, c’est une conséquence directe d'un système de monopole obsolète. Dans son interview accordée au magazine GGB, Paul Burns explique qu’« en raison de l'importante présence du marché des jeux en ligne non réglementés au Canada, personne n'a eu de monopole depuis 25 ans ». Les monopoles locaux ne détiennent donc qu’une faible part du marché, puisque les canadiens jouent sur les sites illégaux. Une situation qui empêche les provinces d’entrer en possession d’une part importante des revenus générés par ces activités. Elle atteste aussi de l’urgence d’adopter des lois pour encadrer le jeu en ligne.
Selon de récentes déclarations de l'Association Canadienne du jeu, les plateformes offshore non autorisées attirent de plus en plus de joueurs au détriment des canaux légaux, en proposant des cotes plus compétitives, une plus grande variété de jeux, ainsi que des incitations comme la possibilité de gagner de l’argent réel grâce à des bonus sans dépôt. Ces offres, généralement absentes chez les opérateurs provinciaux, séduisent un nombre croissant de joueurs canadiens. Des figures de l'industrie alertent : sans réforme réglementaire rapide, la domination des services de jeu gérés par les provinces pourrait bientôt appartenir au passé. La popularité grandissante de ces sites non régulés révèle une évolution du paysage, une évolution qui met à l’épreuve à la fois les mécanismes de contrôle et l’avenir du jeu responsable au Canada.
Le succès du modèle Ontarien
En 2022, l’Ontario fut la première province canadienne à se doter d'une loi réglementant le secteur du jeu en ligne. Aujourd'hui, elle apparaît comme une référence en matière de libéralisation réussie du marché. Avant 2022, Ontario estimait qu’environ 70 % des joueurs de sa province jouaient sur des sites illégaux. La libéralisation du marché a permis de récupérer une grande partie de ces joueurs. Une enquête réalisée par Ipsos en mars 2023, révèle que 85,3 % des ontariens interrogés qui ont joué en ligne pendant les trois derniers mois l’ont fait sur des sites réglementés.
En effet, grâce à cette ouverture du marché des jeux sur internet, de nombreux opérateurs privés se sont inscrits auprès de Jeux en ligne Ontario (iGO), la division de la Commission des Alcools et des jeux de l’Ontario (CAJO) chargée d’établir et d'encadrer ce nouveau marché. L’inscription donne droit à un permis de la iGO qui leur permet d’opérer en toute légalité sur le territoire. De plus, la CAJO a certifié des milliers de jeux pour offrir de la diversité aux amateurs de jeu en ligne. Cela a grandement contribué à réduire l’influence des sites de jeux illégaux dans la province.
La CAJO rapporte d'ailleurs que l’Ontario a atteint un taux de canalisation de 84 %. Autrement dit, la majorité des activités de jeux en ligne ont été transférées vers des plateformes réglementées. Les statistiques de H2 Gambling Capital quant à elles parlent d'un taux de canalisation plus élevé. Il s'agit de 93 %, une amélioration évidente par rapport au 83 % enregistré en 2023. Pour Paul Burns, c'est un modèle réussi.
L'Alberta sur la bonne voie
Plus récemment, c’est l'Alberta qui tente d’emprunter les pas de l’Ontario en approuvant une loi sur les jeux en ligne. Toutefois, c'est au premier semestre 2026 que ce nouveau marché réglementé commencera à prendre forme. Jusqu’à présent, PlayAlberta, l’offre monopolistique de la province enregistre environ 20 % de taux de canalisation selon Paul Burns. En d’autres termes, le jeu illégal domine toujours le marché du jeu en ligne en Alberta.
Avec la mise en œuvre du nouveau cadre réglementaire, la province prévoit des mesures de protection rigoureuses pour les consommateurs. Bien que les récents amendements sur l’inclusion de mesures de protection strictes en matière de jeu responsable aient été rejetés, le cadre réglementaire est en bonne voie. En s’inspirant en outre du modèle ontarien, l’Alberta pourrait bien avoir un meilleur dispositif de canalisation.
Une invitation pour les autres provinces canadiennes à se mettre au pas
En dehors de l’Ontario et de l’Alberta, les autres provinces du Canada ne semblent pas vouloir se départir de leurs offres monopolistiques. Pour la plupart, les structures de loteries régionales, censées avoir le monopole du jeu en ligne sont dépassées par les sites de jeux illégaux. Il est vrai que certaines provinces discutent avec l'Association Canadienne du Jeu sur la possibilité de réglementer les jeux en ligne, mais aucune action concrète n’a encore été menée à ce jour. Parle Burns invite les provinces restantes à prendre exemple sur les deux provinces pionnières en la matière, pour remettre le secteur de l’Gaming sur les rails au Canada.