Un étudiant en informatique de l'Université de Sherbrooke a récemment découvert une campagne malicieuse de cybercriminels dans Internet. Cette même campagne, qui diffuse un logiciel malveillant, a infecté les sites de plusieurs entreprises dans le monde. Au Canada, 5 % des sites Web ont subi le même sort.
Page brouillée, fenêtre qui s'ouvre... Voilà ce qu'a découvert le 13 janvier dernier le bachelier de l'Université de Sherbrooke en informatique, Philippe-Antoine Plante. Pour que la page s'affiche correctement sur le site légitime d'une PME, M. Plante devait télécharger une police particulière par l'entremise d'un document proposé. Il a alors compris que des risques étaient présents en faisant l'action.
« Ce qu'on a découvert, c'est une campagne de distribution de virus. Ce que ça veut dire, c'est que c'est utilisé par les opérateurs pour distribuer ce qui est à leur guise. Lorsque j'ai vu la problématique de la page, j'ai contacté un de mes collègues en sécurité et on a commencé à faire de l'ingénierie inverse pour comprendre le fonctionnement de la campagne », fait valoir M. Plante.
Philippe-Antoine Plante et son collègue Anthony Branchaud, analyste en sécurité, ont contacté les propriétaires de sites infectés et ils ont reçu les fichiers malicieux des sites Web légitimes. « De fil en aiguille, on a réussi à trouver que des milliers de sites légitimes étaient infectés comme ceux des entreprises ou des administrations publiques du Québec, du Canada et d'ailleurs dans le monde. Notre recherche indique que cette campagne a ciblé 5% des sites qu'on a trouvés », souligne M. Plante.
Dans le giron informatique depuis 2014
Depuis 2014, cette campagne a commencé à faire sentir sa présence. La notion de police manquante n'était par contre pas quelque chose de connu au début des recherches de M. Plante et de M. Branchaud. « À ce stade-ci, on a déjà trouvé des sites de la région qui sont infectés. On a proposé à une entreprise de désinfecter son site en échange d'avoir les fichiers infectés pour continuer notre recherche. On a remarqué que la campagne a commencé au début décembre 2016. On a vu ça autour du 13 janvier », précise M. Plante.
« Le virus qui était distribué par la campagne à ce moment n'avait pas un impact très grand sur l'ordinateur, car c'était des clics malicieux sur l'ordinateur pour générer des revenus. Par contre, la campagne est en train de s'ajuster et les opérateurs aussi. En ce moment, c'est d'autres types de menaces qui sont sur les sites, et non plus la police manquante. Ce qu'on a trouvé, c'est une campagne de distribution qui avait une approche nouvelle en proposant une police manquante à l'utilisateur. Ça détermine quel logiciel proposer à l'utilisateur. C'est difficile de savoir pour les utilisateurs si leur site est infecté avec cette méthode », soutient le bachelier en informatique.
De nombreuses infections informatiques
Près de 32 % des ordinateurs dans le monde sont infectés par un maliciel. En 2015, les utilisateurs d'ordinateurs touchés par un cryptovirus ont payé en rançon près de 325 M$. Près de 70 % des entreprises canadiennes ont subi des cyberattaques. Le coût moyen des incidents : 15 000 $.
La campagne fait en sorte qu'un site légitime peut devenir malicieux. Au moment d'écrire ces lignes, le virus distribué n'est pas encore très nuisible. « Rien n'empêche que la campagne puisse distribuer du cryptovirus. En effet, ça peut être difficile de désinfecter une machine, car le virus est très bien conçu. Sa signature change au fil du temps également », explique M. Plante.
Présentement, la recherche a permis de découvrir quels sites étaient infectés. Une liste a été transmise à un organisme de coordination à Ottawa. Ce même organisme s'occupe de contacter les propriétaires de sites infectés, car si la campagne commence à distribuer des cryptovirus, il peut y avoir un impact financier.
« On continue de suivre la campagne et on essaie de trouver le plus possible les sites infectés pour notifier les propriétaires le plus rapidement possible pour qu'ils puissent remédier à la situation », illustre M. Plante.
« À l'avenir, on peut entrevoir de nouvelles menaces, mais tant que les opérations s'avèrent efficaces, ils continueront d'être un danger pour les utilisateurs. C'est une bataille constante, mais il est rassurant de savoir que les gens commencent à être plus sensibilisés à ce type de menace », ajoute-t-il.