Dans une lettre ouverte, les membres de la Table interreligieuse dénoncent la décision du ministre de la Santé du Québec, Christian Dubé, de réduire le nombre de fidèles permis entre les murs des lieux de culte.
Depuis le début de la crise de la Covid-19 que
connaît le Québec, les leaders des groupes religieux du Québec ont collaboré
étroitement avec les autorités de la santé publique. À bien des égards, les
mesures sanitaires mises en place dans les lieux de culte dépassent les
exigences gouvernementales. Avec le résultat qu'à ce jour, à notre
connaissance, aucune éclosion n'a eu lieu dans un lieu de culte. En ces temps
difficiles, les leaders religieux font tout le nécessaire pour mettre en place
les mesures qui assurent la protection de la santé de leurs fidèles.
En ces temps troublés, des milliers de Québécoises et
de Québécois trouvent dans la pratique de leur religion un réconfort et une
source de résilience qui bénéficie à l'ensemble de la population. Quoi qu'on
puisse en penser, la spiritualité et la recherche de sens ont une place essentielle
dans la vie humaine. Ce service à la communauté nous apparaît nécessaire pour
aider nos fidèles à traverser cette crise sanitaire.
Les leaders religieux n'ont pas ménagé les efforts
pour tenter d'entreprendre un dialogue franc et ouvert avec les autorités
gouvernementales, dans un esprit de collaboration. Les lettres qui n'ont pas
même reçu d'accusé de réception, les appels téléphoniques et les courriels
laissés sans réponse ne se comptent plus. Alors que dans les provinces
voisines, les autorités gouvernementales sont en contact direct et constant
avec les leaders religieux, il n'y a aucune communication du même genre au
Québec. Cette situation est décevante et inacceptable.
Le ministre de la Santé a
annoncé dimanche après-midi une série de mesures plus strictes visant à
protéger la population de la Covid-19. Toutefois, le manque de dialogue que
nous dénonçons fait en sorte que le gouvernement place encore une fois dans la
même catégorie les lieux de culte et les bars. Dans son communiqué, le
ministère de la Santé parle du même souffle des « activités
dans les lieux de culte et dans les salles où est permis la vente ou le service
de boissons alcooliques pour consommation sur place ». À sa face même, cet amalgame est injustifié
et faux.
À l'évidence, les rassemblements dans les lieux de
culte sont en vérité assimilables à ceux qui ont lieu dans les cinémas et les
salles de spectacle, selon les critères mêmes du gouvernement : « Les
lieux où les personnes sont assises, relativement immobiles et parlent peu ou
pas, par exemple les salles de spectacle, cinémas, théâtres et studios de
captation audiovisuelle, peuvent continuer d'accueillir un maximum de 250 personnes. '' Le gouvernement nous
semblait avoir déjà reconnu cette similarité dans l'arrêté numéro 2020-059 du
ministre de la Santé et des Services sociaux en date du 26 août 2020, qui
permet aux personnes assises dans les lieux de culte d'enlever leur masque ou
couvre-visage lorsqu'elles sont immobiles et de s'asseoir à 1,5 mètre les unes
des autres, comme dans les salles de spectacle et les cinémas. De plus, les
protocoles de réouverture sécuritaire des lieux de culte établis conjointement
avec les autorités de santé publique font en sorte que les communautés réunies
dans les lieux de culte prennent soin de limiter au maximum les prises de
parole des assemblées.
Par conséquent, nous exigeons des autorités gouvernementales qu'elles reclassifient dès aujourd'hui les lieux de culte dans la catégorie des salles de spectacles, des cinémas et des théâtres, ce qui permettrait de continuer à accueillir jusqu'à 250 personnes dans nos lieux de culte au lieu d'être limité à 25 ou à 50. Nous demandons également qu'un canal de communication franc et ouvert soit instauré entre nous et les autorités gouvernementales. Nous ne demandons pas un privilège. Nous nous présentons comme des partenaires et souhaitons simplement être considérés justement par le gouvernement.
Nous, leaders religieux membres de la Table interreligieuse du Québec, tenons à rappeler que nous aspirons à un dialogue ouvert avec les autorités gouvernementales. Nous espérons sincèrement que la présente demande sera suffisante pour faire valoir nos droits et recevoir du gouvernement la reconnaissance qui est due aux citoyens qui pratiquent leur religion en tout respect des règles sanitaires.
Au nom des membres de la Table interreligieuse ,
Christian Rodembourg
Évêque de Saint-Hyacinthe
Président de l'Assemblée des évêques catholiques du Québec