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Les réflexes du boutiquier

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Photo : Ces vingt dernières années, nous avons patiemment cherché à faire le virage d’une économie à forte intensité de main d’œuvre à une économie à valeur ajoutée.
Daniel Nadeau Par Daniel Nadeau
Mardi le 21 novembre 2017

Dans la foulée de l'élection d'un nouveau maire à Sherbrooke et d'une campagne électorale qui a fait l'impasse sur les grands enjeux de notre époque, il faut rappeler que nous vivons une période charnière qui pourrait bien mener notre planète et notre civilisation à sa fin si nous ne faisons rien pour réduire les gaz à effet de serre et surtout si nous continuons à refuser les changements inéluctables qui sont à notre porte.

Ces changements sont largement documentés, nos modes de produire se transforment et de nos jours, nous manipulons plus de données que de marchandises. Nos modes de consommation sont à revoir en regard de la nécessité de diminuer notre empreinte environnementale et de réduire nos déchets. Nous devons aussi faire des choix différents quant à nos moyens de mobilité et à ce que nous consommons pour nous alimenter. Notre planète est menacée et il se fait tard.

Dans ce contexte, que pouvons-nous faire concrètement? À l'échelle de notre ville, nous, citoyennes et citoyens, pouvons-nous y faire quelque chose? La réponse est oui. L'un des vecteurs de l'intervention de notre ville à la faveur de l'avenir de nos enfants et de nos petits-enfants est de faire les bons choix pour que Sherbrooke devienne une ville phare du 21e siècle.

En ce sens, les dossiers du déplacement du pont des Grandes Fourches, la mise en œuvre du projet Well Inc. et la réalisation du plan 20/20 du centre-ville adopté par le précédent conseil municipal sont capitaux pour l'avenir de notre ville et pour en assurer la prospérité et la pérennité parmi les autres grandes villes du Québec. Ces dossiers ont été discutés de façon triviale jusqu'à maintenant. Il est temps que nous en parlions sérieusement. Réflexion autour de l'avenir de Sherbrooke.

Des orientations fondamentales

J'ai eu l'occasion de l'écrire dans des chroniques précédentes, Sherbrooke est une ville qui s'est autrefois distinguée dès le 19e siècle par son innovation et son entrepreneuriat. C'est à Sherbrooke que fut construite la première automobile, nous avons été la première ville au Québec à municipaliser notre hydro-électricité, bien avant que le Québec nationalise les compagnies privées pour créer ce qui est devenu Hydro-Québec.

Ces vingt dernières années, nous avons patiemment cherché à faire le virage d'une économie à forte intensité de main d'œuvre à une économie à valeur ajoutée. Nous avons à la suite d'une concertation de tous les intervenants économiques de Sherbrooke dans le cadre d'un sommet convoqué par l'ancien maire Perrault, fait le virage vers l'innovation. Nous avons créé Sherbrooke Innopole et mis en œuvre une stratégie économique basée sur l'idée des grappes industrielles popularisées au Québec par l'ancien ministre libéral Gérald Tremblay, stratégie connue sous le nom de filières-clés.

Devant une urbanisation débridée dictée bien souvent par les intérêts du moment, nous avons tenté de nous donner une vision de développement urbain adapté aux circonstances. Des décisions incohérentes comme la création du Plateau Saint-Joseph ont cependant fait naître une solide opposition citoyenne qui a retardé de près de dix ans l'adoption d'un schéma d'urbanisme adapté à notre époque. Un schéma qui reprend à son compte des idées comme la consolidation des pôles de développement de l'économie du savoir, le soutien à une base manufacturière diversifiée, la concentration de l'offre commerciale tout en assurant une desserte commerciale de quartier dans chacun des milieux de vie, la densification du territoire ainsi que la consolidation et le développement de pôles urbains stratégiques susceptibles de favoriser le transport urbain collectif et le transport actif.

L'une des orientations les plus fondamentales est la consolidation du caractère spécifique du centre-ville de Sherbrooke qui se traduira entre autres par le renforcement de ses activités culturelles, la réaffirmation du lieu d'accueil des services administratifs régionaux, le développement d'un écosystème entrepreneurial prospère et le développement d'un fort caractère résidentiel.

L'actualité des quartiers centraux et de la mobilité durable

Jusqu'à présent, les débats publics sur le déplacement du pont des Grandes-Fourches et de Well Inc. ont porté sur des aspects éthiques et financiers. Cela est compréhensible, ces projets porteurs d'avenir sont devenus de simples enjeux électoraux par lesquels les candidats en présence cherchaient à se distinguer les des autres alors que le maire sortant voulait en faire l'étendard de sa vision. Il n'est jamais facile de débattre d'enjeux aussi importants que ceux-là dans la cacophonie d'une élection. Il aurait été plus utile de parler de notre vision de l'avenir de Sherbrooke durant cette dernière campagne électorale plutôt que de s'attaquer de façon démagogique à des projets particuliers.

Pourtant, le développement du centre-ville est la clé de notre prospérité et constitue non pas une dépense inappropriée, mais c'est en quelque sorte, notre planche de salut. Au lieu d'en parler dans ces termes, le centre-ville a fait l'objet de débats oiseux et on en a discuté comme un irritant, une menace ou encore comme un projet concurrent pour les autres quartiers de la ville. Quelle bêtise! Nous sommes sûrement la seule ville où l'on retrouve des gens qui n'aiment pas leur centre-ville. C'est comme si on se refusait comme ville le droit de se donner une identité.

Les centres-villes ont historiquement toujours été des hauts lieux d'animation et d'interaction, jusqu'au tournant des années 1950 où la démocratisation du transport par l'automobile a profondément changé la donne. Chez nous, la création du Carrefour de l'Estrie a littéralement tué notre centre-ville. Le plateau Saint-Joseph a ajouté des défis pour notre centre-ville.

Cela s'inscrivait dans une logique où la mixité des usages et la mixité sociale étaient remplacées par des quartiers à fonction unique. On a choisi l'isolement plutôt que l'interaction, la quiétude des banlieues plutôt que l'effervescence des quartiers centraux, l'automobile et la société du pétrole plutôt que la marche, le transport actif, le transport collectif et le développement durable. Ces choix du 20e siècle ne sont plus d'actualité à l'heure où les changements climatiques vont dramatiquement bousculer nos vies. Il y a urgence d'agir.

Les projets Well Inc. et pont Abénaquis

Les projets Well Inc. et celui de déplacer le pont des Grandes-Fourches pour en faire le pont Abénaquis ne sont pas une lubie de l'ancien maire de Sherbrooke ni des idées de grandeur déconnectées de la réalité de notre époque. Je veux bien que le nouveau conseil municipal et le nouveau maire, Steve Lussier, se penchent une fois encore sur ces dossiers et qu'ils y apportent leur touche personnelle. C'est leur droit et leurs prérogatives puisqu'ils ont été élus. Il ne faudrait pas cependant que l'on perdre de vue que l'avenir de Sherbrooke et sa prospérité future sont liés à un centre-ville revivifié par la création d'une culture entrepreneuriale forte et d'un caractère résidentiel et commercial dynamiques.

Ces projets qui sont des investissements importants, convenons-en, sont fondamentaux pour notre avenir. Ils permettront de redonner aux Sherbrookoises et aux Sherbrookois le cœur historique de la ville de Sherbrooke, créeront un milieu de vie résidentiel et commercial d'avant-garde, redynamiseront le développement économique de la ville, affirmeront la place de Sherbrooke parmi les grands centres économiques du Québec et permettront enfin de donner une identité forte à Sherbrooke en développant un sentiment d'appartenance de la population envers le centre-ville.

Pour un centre-ville innovateur et créateur de richesses

Le centre-ville constitue le lieu le plus propice à la rencontre des forces vives de notre communauté et le plus apte à y faire naître une synergie créatrice d'innovation. C'est le lieu par excellence pour attirer et retenir chez nous les millénaristes qui sont adeptes du mode de vie Work, Live and Play et où la mobilité durable et les contenus culturels se rencontrent dans un lieu de créativité. C'est un lieu de rencontre exceptionnel où la nature et la culture se juxtaposent dans un cadre bâti exceptionnel et patrimonial.

Il serait vraiment dommage que nous rations cette opportunité extraordinaire de faire de Sherbrooke un centre urbain important au Québec. Cette ville possède une tradition d'entrepreneuriat et d'innovation qui est devenue notre marque de commerce. Cette tradition doit aujourd'hui se traduire par une vision innovante de l'avenir de notre centre-ville. Il faut investir dans notre avenir. Nous ne devons pas céder à nos réflexes de boutiquiers...


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