Nous sommes dans le désert de Sonora au sud-est de la Californie. Notre
trajet est planifié dans le but de longer Salton Sea, ce lac situé directement
sur la faille de San Andreas.
Salton Sea est un lac salé endoréique. Un peu d'information pour comprendre
comment ce phénomène s'est produit. « Endoréique » signifie que les
eaux n'atteignent pas la mer et se perdent dans les dépressions de terrains.
Toute précipitation qui tombe ne quitte le sol qu'en s'évaporant. Ces eaux sont
plus salées que celle de l'océan Pacifique et la concentration saline augmente
à chaque année.
Ce lac fut crée par une importante crue de la rivière Colorado en 1891. En
1906, une nouvelle crue provoque une catastrophe. L'eau se déverse par les
canaux d'irrigation pendant plusieurs mois dans la plaine de Salton noyant
fermes et habitations. Elle inonda 1000 kilomètres carrés de désert et créa une
mer intérieure.
Le lac a 56 kilomètres de long et 3 terrains de camping se trouvent sur le
trajet. Nous sommes arrêtés à chaque terrain et pour différentes raisons nous
ne choisissons pas de camper dans ni l'un ni l'autre de ces campings. Ce que
nous avions vu sur YouTube était un paysage de carte postale avec des plages de
sable fin et une myriade d'oiseaux migrateurs. Malheureusement la réalité est
autre chose.
En effet, en 2011, le lac a été sinistré et est devenu gorgé de sel et de
pesticides. Des milliers d'oiseaux meurent à Salton Sea depuis ce temps. On en
compterait jusqu'à 640 par jour qui succombent, victimes de botulisme aviaire (maladie
animale et humaine causée par une toxine produite par une bactérie. Cette
toxine paralyse les muscles locomoteurs, respiratoires et viscéraux).
À plusieurs endroits sur les rives du lac, des enseignes annoncent que l'État
de la Californie entreprendra des travaux de réhabilitation du lac. Ce projet,
lequel s'étalera sur une période de 75 ans, consistera à établir des marais salants
pour les oiseaux et un grand plan d'eau pour les loisirs. 75 ans... On y croit....
ou ... on n'y croit pas ???
Notre plus grand désappointement a été Bombay Beach, le seul endroit sur le
bord du lac où il y a une concentration de gens qui habitent des logements
collectifs non institutionnalisés. Il y a environ 300 personnes qui résident à
Bombay Beach. On y trouve un petit marché, deux bars, une boutique d'appâts qui
ne sert plus à rien, une station de pompiers volontaires, un motel et des
ruines de l'ancienne Mecque de la pêche maintenant inondées.
Il y a quelques années la communauté était composée de retraités blancs. Au
cours de la dernière décennie cependant, une population de jeunes
afro-américains s'est installée. Sur les terrains, des taudis, il n'y a que de
vieilles voitures ayant servies autrefois où si on les utilise encore, elles ne
feraient pas la grande route. Étant donné que la station service la plus proche
est située à plus de 40 kilomètres et que les habitants ne peuvent se permettre
d'acheter de l'essence, la population se déplace surtout en voiturettes de
golf.
Bombay Beach est gardé au sec par une énorme digue qui entoure la ville dont
les rues forment un quadrilatère d'une superficie d'environ 4 kilomètres carré.
Quelle surprise de voir toute cette déchéance...toute cette pauvreté. Nous qui
s'attendions à voir une plage avec des touristes qui se baignaient, jamais nous aurions mis les pieds dans l'eau
de ce lac. Il y avait aussi l'odeur, celle des œufs pourris. Robert s'est attardé
plus longtemps que moi pour prendre des photos. Quant à moi, je n'ai pas tardé
à retourner à notre roulotte.
Lors de notre passage, des prisonniers vêtus de l'uniforme orange de l'état de
la Californie nettoyaient les terrains de Bombay Beach sous la surveillance
attentive des policiers ou gardiens de prison armés. Les prisonniers avaient le
temps de nous regarder car les autos ne circulaient pas en grand nombre dans
cette ville fantôme.
Voilà un désenchantement vécu et il fait partie de la culture des voyages.
Revenez-nous la semaine prochaine pour une partie de notre Monde.