S'en est terminé des services juridiques à moindre coût pour
ceux qui sont trop riches pour l'aide juridique, mais pas assez pour se payer les
services d'un cabinet privé.
Une combinaison de l'abolition de la Conférence régionale
des élus, du Forum jeunesse de l'Estrie et pas d'appel de projets du Fond Accès
Justice cette année, la clinique juridique est forcée de cesser ses activités.
« On a fait toutes les démarches auxquelles on avait pensé. J'ai
appelé les députés de la région, on a écrit une lettre à la ministre de la
Justice, on a même revu notre modèle d'affaires, explique la directrice
générale de l'organisme, Me Valérie-Claude Lessard. Pour survivre seuls, il
aurait fallu qu'on change notre modèle d'affaires au point de dénaturer notre
mission. »
Quatre emplois seront perdus : deux avocats, une
technicienne et celui de Me Lessard.
Un appel à l'aide
sans réponse
Juripop Estrie finançait ses activités de deux façons. La première,
en tarifs à ses clients. Des tarifs nettement inférieurs à ce qu'exigent les
cabinets privés conventionnels.
« Il faut comprendre que les organismes qui font dans la
justice ne sont pas financés à la mission comme la grande majorité des
organismes communautaires, souligne Me Lessard. On n'est pas admissibles au
Programme de soutien aux organismes communautaires, le PSOC, ce qui fait qu'on
n'a pas droit à du financement récurrent. »
La deuxième source de financement provenait d'appels de
projets du Fond Accès Justice. Or, l'organisme a appris au mois de juillet que
le Fond ne ferait pas d'appel de projets cette année.
« Avec les projets spéciaux, on arrivait à poursuivre nos
activités. La clinique de St-Constant nous donnait aussi un coup de main mais
comme leur situation financière est précaire, ils doivent prioriser leurs
activités. C'est normal. »
La directrice générale déplore le silence du gouvernement
devant la disparition d'un service essentiel pour des milliers de personnes qui
n'ont pas les moyens de faire valoir leurs droits.
« J'ai contacté les députés au début du mois d'août et M.
Fortin s'est engagé à transmettre notre message, affirme Me Lessard. Notre
lettre à la ministre est restée sans réponse.»
Un service pour l'«
entre deux chaises » disparaît
Être trop riche pour avoir accès à l'aide juridique, c'est
gagner 43 000 $ par année pour une famille composée de deux adultes
et deux enfants. Pour une personne seule, c'est de gagner plus de 26 000 $.
Juripop Estrie acceptait un revenu familial jusqu'à 70 000 $
pour une famille de quatre enfants.
« Pour ces revenus, il y a d'autres priorités que d'acquitter
des factures de frais d'avocats, selon Me Lessard. On offrait un soutien
juridique en droit de la famille, du travail, en droit civil. On aidait des
organismes sans but lucratifs, des petites entreprises souvent en démarrage et
des travailleurs autonomes. »
L'organisme demandait entre 40 et 70 $ de l'heure pour
ses services, « souvent deux fois moins cher que le prix du marché », souligne
Me Lessard.
« On voulait combler un besoin qui ne l'était pas autrement.
Il y n'y a pas d'autre ressource comparable à Sherbrooke. Il y des cliniques d'information
universitaires, mais les gens ne peuvent pas être représentés par les
étudiants. »
Presque tous les clients de Juripop Estrie ont été avisés de
la fermeture du service. Selon la directrice de l'organisme, beaucoup de
dossiers ont été réglés et d'autres avocats ont accepté de reprendre certains
dossiers au même tarif.
Depuis sa création il y a trois ans, l'organisme a ouvert
plus de 500 dossiers, sans compter les études et les avis diffusés, notamment
auprès des victimes de la tragédie de Lac-Mégantic.