Les élèves qui font des arts à l'école auront un développement global plus complet puisqu'au-delà du raisonnement et de l'analyse logique, ils auront appris à voir les choses avec tous leurs sens. C'est du moins l'avis d'Alain Savoie, professeur agrégé à la Faculté d'éducation de l'Université de Sherbrooke.
« Comme toutes les autres matières, les arts vont aider les enfants dans leur développement global », affirme M. Savoie. Le professeur s'intéresse particulièrement aux bénéfices psychocognitifs et émotionnels que les arts plastiques apportent aux élèves et à l'intégration des arts dans les écoles primaires.
« Ils n'ont pas juste besoin de matières scolaires qui vont les aider à développer leur sens analytique et leur raisonnement, ils ont aussi besoin d'un côté plus perceptif, d'apprendre à voir les choses d'une autre manière. On parle ici d'un développement plus global qui touche à la créativité, à l'imagination. Dans le parcours scolaire, on doit éviter de laisser ça de côté », explique le professeur.
D'ailleurs, à la suite de la publication d'études internationales, certains pays auraient déjà décidé d'intégrer plus d'arts et de créativité dans les programmes scolaires.
« Aux États-Unis et au Royaume-Uni, on commence à faire des changements dans les programmes éducatifs pour mettre l'accent sur la créativité, même dans les cours de mathématiques et de sciences, souligne M. Savoie. Un scientifique doit être créatif pour réussir, tout comme un financier! Finalement, on se rend compte que la créativité est nécessaire dans tous les domaines. On doit former les jeunes tôt parce que les performances créatives et imaginatives sont extrêmement valorisées actuellement. »
Pour le professeur, il ne suffira pas non plus de n'intégrer que quelques heures d'arts dans la grille horaire de l'école : il faudra entretenir et préserver ces facultés que les enfants ont déjà à l'intérieur d'eux et leur montrer à les exploiter. Comment y arriver, donc?
« C'est sûr que ça prendra une volonté politique et les écoles devront avoir conscience que les arts sont tout aussi importants que les autres matières dans le développement des enfants. Mais actuellement, les enseignants en ont déjà plein les bras avec les maths, la lecture et l'anglais. On fait des arts quand on a le temps d'en faire », déplore M. Savoie.
Selon lui, les directions d'école et les enseignants ont un grand rôle à jouer dans une pratique des arts plus importante au primaire. Puisque les décisions comme celles-ci se prennent souvent au conseil des commissaires d'une commission scolaire, les parents doivent demander à ce que leur progéniture dessine, joue, sculpte, crée plus.
« Si les parents le demande, peut-être qu'on en fera plus. Des écoles engageront des spécialistes en arts plastiques, comme ils le font avec les cours de musique. Souvent, les enseignants qui donnent les séances d'arts sont les généralistes et parfois, ils en sont pas à l'aise ou très confiants de leurs capacités dans le domaine. Mais avec un peu de culture et de connaissances, on arrive à se débrouiller », souligne M. Savoie.
Le ministère de l'Éducation préconise toutefois de faire des arts et de les intégrer dans les autres matières, mais il s'agit d'un processus qui est loin de se faire systématiquement pour plusieurs raisons.
« Dans la réalité, les arts ne sont pas une priorité pour les écoles et ce sera la matière la plus rapidement mise de côté entre autres parce qu'elle n'est pas évaluée de la même manière que les autres matières scolaires. C'est plus facile de passer à côté, d'autant plus qu'ils sont toujours en compétition avec l'éducation physique, les sciences et l'anglais pour une place dans la grille horaire », affirme-t-il.
Les arts jouent un tout autre rôle dans certains systèmes d'éducation, comme en Finlande, que le Québec se plaît à envier. Selon M. Savoie, les arts contribuent assurément au fait que ces pays se classent toujours en tête de file dans les évaluations sur la réussite scolaire des élèves.
« Il s'agit d'une question de société et si tous les organismes en culture et en arts poussent dans le même sens, le gouvernement comprendrait qu'on souhaite que les arts prennent plus de place, à l'école notamment. Actuellement, chaque école a aussi des choix à faire. Si les enseignants sont motivés et veulent intégrer plus d'arts dans leurs classes mais que la direction n'est pas très chaude à l'idée ou ne saisit pas les bénéfices que ça peut apporter, ces belles idées en resteront-là », déplore le professeur.
Cependant, les futurs enseignants sont plus sensibles à la créativité lorsqu'ils arrivent à l'université, constate M. Savoie. Selon lui, cette tendance pourrait occasionner un changement de mentalité vis-à-vis des arts.
« Pour les enfants, c'est jouer que de faire des arts plastiques. C'est motivateur, même chez les élèves qui sont en difficultés. C'est pour cette raison qu'on doit intégrer les arts dans toutes les matières. Nos futurs enseignants sont plus créatifs, leurs travaux et leurs idées sont d'une qualité supérieure. Je suis optimiste quant au fait qu'ils vont en faire, avec leurs élèves, de la danse, des arts plastiques, de l'art dramatique et de la musique! », conclut-il.